La loi doit garantir expressément aux deux parents les mêmes droits en matière d’autorité parentale et de garde des enfants.
ÉTUDE DE CAS :
le législateur doit modifier les lois qui n’accordent pas aux deux parents les mêmes droits en termes d’autorité et de garde, en théorie ou en pratique. Par exemple, dans l’affaire Geeta Hariharan c. Banque indienne de réserve, la Cour suprême s’est prononcée sur la validité constitutionnelle de la Loi relative à la minorité hindoue et au droit de garde (en anglais) et s’est demandé si cette loi privait les femmes de leur droit de garde. L’article 6 de cette loi est discriminatoire à l’égard des femmes puisqu’il dispose :
La garde d’un mineur hindou, tant en ce qui concerne sa personne que ses biens (à l’exclusion de ses intérêts indivis dans un bien familial), est naturellement confiée :
a. dans le cas d’un garçon ou d’une fille non mariée, en premier lieu au père, et en second lieu à la mère, sauf si le mineur a moins de cinq ans, auquel cas la garde est ordinairement confiée à la mère ;
b. dans le cas d’un garçon illégitime ou d’une fille illégitime non mariée, en premier lieu à la mère, et en second lieu au père ;
c. dans le cas d’une fille mariée, à son époux.
Cependant, la Cour suprême a interprété cet article comme reconnaissant que la mère et le père sont les responsables légaux naturels de leurs enfants. Voir le document du Collectif des avocats sur la protection juridique des femmes à l’adresse : http://www.lawyerscollective.org/wri/projects-activities/legal-aid-cell-pil (en anglais). Toute loi doit garantir sans équivoque cette égalité.
- La loi doit préciser que, dans toutes les affaires où il y a eu des violences conjugales, familiales ou liées à la dot entre les parents ou entre la belle-fille et ses beaux-parents, il existe une présomption simple selon laquelle il est néfaste pour l’enfant et il n’est pas dans son intérêt supérieur d’être confié à la garde exclusive de l’auteur des violences ni placé sous sa garde ou son autorité parentale partagées. En cas d’assassinat ou de violences liés à la dot entre la belle-fille et ses beaux-parents, cette règle doit aussi s’appliquer aux beaux-parents. Cette présomption doit également être valable pour les affaires qui ont trait à des ordonnances de protection, à la délinquance juvénile et à la protection de l’enfance.
- La loi doit exiger du tribunal qu’il accorde la priorité à la sécurité et au bien-être de l’enfant et du parent victime de violence familiale.
- Elle doit aussi lui demander de tenir compte des antécédents de l’auteur des faits en matière de violence physique ou psychologique à l’encontre de membres de sa famille ou des craintes raisonnables de ces derniers dans ce domaine, ainsi que des antécédents de demandes de dot ou de harcèlement lié à la dot.
- La loi doit également préciser que l’absence d’un parent à l’audience ou son déménagement à cause de la violence familiale ou de violences liées à la dot sont des facteurs qui ne doivent pas porter préjudice au parent absent lorsqu’il s’agit de déterminer les droits de garde ou de visite.
Voir le Code type des États-Unis (en anglais), art. 401 et 402.
Par exemple, en Nouvelle-Zélande, la Loi portant modification du droit de garde (1995) contient une présomption contre l’octroi de la garde d’un enfant ou d’un droit de visite sans surveillance à une partie qui a usé de violences à l’égard d’un enfant ou de l’autre partie si le tribunal n’a pas la certitude que l’enfant ne sera pas maltraité. L’existence d’une ordonnance de protection rendue aux termes de la Loi néo-zélandaise de 1995 sur la violence familiale (en anglais) déclenche automatiquement cette présomption. Voir : Un problème à ne pas sous-estimer : analyse de cas sur la question de la garde des enfants et des contacts avec les enfants dans les affaires de violence conjugale (2005, en anglais).
Lieu de résidence de l’enfant
La loi doit préciser que, dans toutes les affaires où il a eu des violences conjugales, familiales ou liées à la dot entre les parents ou entre la belle-fille et ses beaux-parents, il existe une présomption simple selon laquelle il est dans l’intérêt supérieur de l’enfant de résider avec le parent qui n’a pas commis les violences, dans le lieu choisi par ce parent.
En cas d’assassinat ou de suicide lié à une demande de dot ou à des violences liées à la dot, la loi doit contenir une présomption simple selon laquelle il n’est pas dans l’intérêt supérieur de l’enfant de résider avec ceux qui ont demandé ou reçu la dot. Cette présomption doit également être valable pour les affaires qui ont trait à des ordonnances de protection, à la délinquance juvénile et à la protection de l’enfance.
Voir le Code type des États-Unis (en anglais), art. 403.
Dispositions légales concurrentes
La loi doit préciser que, lorsqu’il existe des dispositions légales incompatibles avec les présomptions simples évoquées ci-dessus, par exemple une disposition sur le « parent amical » qui favorisera le parent encourageant des contacts fréquents avec l’autre parent, ou une présomption en faveur de la garde partagée, ces dispositions ne doivent pas s’appliquer en cas de violence familiale ou de violences ou d’assassinats liés à la dot. La loi doit préciser que, lorsqu’il existe des dispositions légales incompatibles avec les présomptions simples évoquées ci-dessus, par exemple une disposition accordant la garde de l’enfant aux parents du mari, ces dispositions ne doivent pas s’appliquer en cas de violences ou d’assassinats liés à la dot.
Voir : Décisions relatives au droit de garde et de visite quand le père a commis des violences contre la mère (2005, en anglais) ; Décisions relatives au droit de garde et de visite dans les affaires de violence familiale : tendances juridiques, facteurs de risque et préoccupations relatives à la sécurité (révisé en 2007, en anglais).
Syndrome d’aliénation parentale
La loi doit établir que le « syndrome d’aliénation parentale » n’est pas une preuve recevable dans les audiences relatives au droit de garde ou de visite. Cette expression désigne une situation dans laquelle l’un des parents est accusé d’aliéner l’enfant afin de l’éloigner de l’autre parent. Or, dans les situations de violence familiale, certains comportements raisonnables destinés à protéger l’enfant de mauvais traitements peuvent être interprétés à tort comme un signe d’instabilité. Voir : Qu’est-ce que le syndrome d’aliénation parentale (en anglais), Conseil directeur sur la maltraitance infantile et la violence interpersonnelle, consulté le 2 septembre 2010.
Droit de visite
La loi doit établir qu’un droit de visite ne peut être accordé à un parent qui s’est rendu coupable de violence familiale ou de violences liées à la dot que si le tribunal estime que des dispositions suffisantes peuvent être prises pour la sécurité de l’enfant et du parent victime de violences. Elle doit offrir les possibilités suivantes pour assurer la sécurité de l’enfant et du parent victime dans les affaires de violence familiale ou de violences liées à la dot :
- le tribunal peut ordonner que la remise de l’enfant se fasse dans un environnement protégé ;
- il peut ordonner que la visite se déroule sous la surveillance d’une tierce personne ou d’une institution ;
- il peut enjoindre à l’auteur de violences de payer les frais de visite sous surveillance ;
- il peut interdire à l’auteur de violences de se trouver en possession d’alcool ou de substances contrôlées pendant la visite et pendant les 24 heures qui précèdent ;
- il peut interdire les visites comprenant une nuit ;
- il peut contraindre l’auteur de violences à signer un engagement garantissant la sécurité de l’enfant et son retour à la fin de la visite ;
- le tribunal peut imposer toute autre condition jugée nécessaire pour la sécurité de l’enfant, de la plaignante/survivante ou d’autres membres de la famille.
Voir le Code type des États-Unis (en anglais), art. 405.
Confidentialité de l’adresse
La loi doit donner au tribunal la possibilité d’ordonner que l’adresse de l’enfant et de la plaignante/survivante ne soit pas révélée – que l’auteur de violences ait un droit de visite ou non. Elle doit aussi exiger que les défenseurs, les agents des services de protection et la police gardent cette adresse secrète.
En outre, la loi doit prévoir des moyens financiers et des lignes directrices pour les infrastructures destinées à protéger la vie privée des victimes. Par exemple, en Inde, le Collectif des avocats a constaté que les agents chargés de la protection ne disposaient pas de bureaux séparés, ce qui portait atteinte à la vie privée des victimes. Lawyers Collective, Staying Alive: Second Monitoring & Evaluation Report 2008 on the Protection of Women from Domestic Violence Act, 2005 (Rester en vie : deuxième rapport de suivi et d’évaluation sur la protection des femmes aux termes de la Loi sur la violence familiale), 2008, p. 22.
Voir le Code type des États-Unis (en anglais), art. 405.
ÉTUDE DE CAS : lignes directrices relatives aux enfants témoins dans des affaires de violence familiale
Les enfants sont souvent témoins des scènes de violence familiale. C’est une source de préoccupation constante pour les professionnels chargés de la protection de l’enfance et du bien-être de l’enfant, les prestataires de services aux victimes de violence familiale et les plaignantes/survivantes de ce type de violence. Si le fait d’assister à ces violences peut avoir des répercussions négatives sur les enfants, de nombreuses mesures peuvent être prises pour atténuer ces effets éventuels.
À partir de 2000, dans la province canadienne de Colombie britannique, un groupe interinstitutions a élaboré et commencé à mettre en œuvre un Recueil des meilleures pratiques concernant la protection de l’enfance et la violence contre les femmes (2004, en anglais, ci-après appelé le Recueil). Ce groupe était composé de médecins et de représentants d’institutions publiques, de centres médicaux et d’organisations non gouvernementales. Les lignes directrices ainsi élaborées s’appuient sur des recherches et des études menées au Canada, au Royaume-Uni et aux États-Unis entre 1995 et 2000 ; elles visent à aider les personnes qui travaillent dans les services de protection de l’enfance à mieux comprendre les conséquences de la violence familiale sur les enfants et permettent de former les prestataires de services dans ce domaine aux mécanismes de la violence conjugale.
Le Recueil part du postulat essentiel selon lequel, dans les situations de violence familiale, la sécurité de l’enfant est étroitement liée à celle de la plaignante/survivante, qui est le plus souvent sa mère. Pour protéger l’enfant, il faut donc prendre des mesures de protection de la mère, en lui offrant des services fiables susceptibles de l’aider sans la punir ni la juger.
Le Recueil conseille aux avocats des pratiques détaillées selon les situations. Par exemple, il les invite à demander quel est le niveau de danger au sein du foyer, s’il y a des armes à feu dans la maison, quelle est la nature des menaces, et si la mère craint pour sa sécurité ou celle de ses enfants.
La réponse du système de protection de l’enfance doit s’appuyer sur une évaluation exhaustive de la situation réalisée par un professionnel bien formé. Si une enquête ou une intervention est nécessaire, le Recueil donne des conseils pratiques aux services de protection de l’enfance pour garantir la sécurité de la mère, notamment des méthodes pour la contacter sans risque ou les meilleurs moyens d’organiser une rencontre (p. 13).
En cas d’inquiétudes immédiates pour la sécurité de l’enfant, le Recueil propose aux services de protection de l’enfance une série de mesures tenant compte de ces inquiétudes tout en respectant la personne qui s’est occupée de l’enfant et l’a protégé jusqu’à présent. Il invite les travailleurs sociaux à :
- expliquer les motifs d’inquiétude à la femme de façon directe, sans la blâmer ;
- recueillir les suggestions de la femme et des services sociaux concernant le plan de mise en sécurité des enfants ;
- élaborer un plan de mise en sécurité qui essaie, dans la mesure du possible, de laisser les enfants avec leur mère en mettant l’accent sur sa sécurité, ses forces et les soutiens dont elle peut bénéficier ;
- examiner dans quelle mesure les choix de la mère peuvent être influencés par des questions financières, des menaces ou d’autres facteurs (p. 14).
Pour une intervention efficace, il faut que les différents acteurs agissent en collaboration et de façon coordonnée, et notamment que les programmes d’aide aux femmes battues, les services de protection de l’enfance, les responsables de l’application des lois et le système judiciaire travaillent ensemble avec pour priorité la sécurité de l’enfant et de la mère. Le Recueil conclut que c’est en éloignant l’homme violent du foyer familial et en l’obligeant à rendre des comptes pour les violences commises, et non en séparant l’enfant de sa mère, que l’on obtient les meilleurs résultats pour l’un comme pour l’autre.
Des lignes directrices sur l’évaluation des risques posés par les hommes violents qui affirment avoir changé sont disponibles dans le document Évaluation des risques encourus par les enfants face aux hommes violents (2002, en anglais).
Voir aussi :
Royaume-Uni : Lutte contre la violence familiale : aide aux enfants qui ont été témoins de violence conjugale (en anglais)
États-Unis : Pour une intervention efficace dans les affaires de violence familiale et de maltraitance infantile : lignes directrices pour les politiques et les pratiques (en anglais) ; Décisions relatives au droit de garde et de visite quand le père a commis des violences contre la mère (2005, en anglais).