La diminution de la violence à l’égard des femmes et du VIH nécessite des interventions de longue durée qui s’attaquent aux facteurs structurels, aux inégalités entre les sexes et aux normes sexospécifiques nuisibles, ainsi que des actions plus immédiates axées sur la prévention de la violence et du VIH et la formulation d’interventions adaptées et de qualité.
La mise en application d’une approche intégrée inclut le développement de politiques, de systèmes et de services, ainsi que des mécanismes de prévention et d’intervention contre la violence à l’égard des femmes. Cette section propose un échantillon d’actions dans les domaines clés de la réforme judiciaire et politique, de la réforme des systèmes de santé et de la mobilisation communautaire axées sur la santé. Pour chaque domaine, des actions d’intégration recommandées sont spécialement désignées à l’attention des responsables de programmes contre la violence et le VIH, ainsi que des intersections – ou points de mutualité, dans la programmation sur la violence et le VIH. Ces points de mutualité représentent des mandats que les programmes sur la violence et sur VIH devront assumer dans leur élaboration.
Malgré le peu d’éléments d’appréciation dont on dispose pour savoir ce qui fonctionne, l’émergence de pratiques prometteuses et l’avis général des professionnels de la santé ont permis de dégager plusieurs pistes clés dans la lutte contre cette double pandémie, qui incluent:
- Des mesures d’exécution à tous les niveaux pour réaliser l’égalité des sexes et prévenir et corriger la violence à l’égard des femmes devront être incorporées comme objectifs prioritaires des programmes et plans nationaux de lutte contre le VIH;
- La prévention, le traitement et les soins en matière de VIH devront inclure une analyse d’impact sur la violence à l’égard des femmes et sur l’inégalité entre les sexes. Les corrélations entre la réduction de la pauvreté, l’amélioration de l’égalité entre les sexes, le diminution de la violence à l’égard des femmes et la recul du VIH devraient être expressément réaffirmées et abordées dans les plans stratégiques pour tous les secteurs pertinents.
- Les plans stratégiques nationaux devraient réaffirmer expressément le rôle de la communauté comme principal moteur de changement.
- Le développement de réseaux régionaux d’organisations et de professionnels de la santé devrait être encouragé, l’accent devant être mis sur l’intégration de l’égalité des sexes et l’élimination de la violence basée sur le gendre (VBG) dans l’élaboration des programmes sur le VIH.
- Les méthodes existantes qui se sont avérées efficaces ou prometteuses devraient être adaptées, reproduites et généralisées. Un élément d’évaluation efficace doit y figurer; il est essentiel à la constitution d’une base de données factuelles solide. S’appuyant sur des exemples existants, d’autres interventions pertinentes sur le plan local qui ont pour but de s’attaquer aux facteurs structurels doivent être encouragées et évaluées.
- Ces programmes doivent bénéficier d’un financement continu;
- Les programmes pour la réduction de la violence dans le cadre de la prévention du VIH devront tenir compte de la grande diversité des personnes qui subissent et infligent la violence sexiste;
- L’intégration de la violence sexiste dans l’élaboration des programmes anti-VIH devrait s’opérer en vertu des principes des droits de la personne, et s’attaquer à la stigmatisation et à la discrimination;
- L’accès aux services de soins de qualité et intégrés pour les cas de viol, y compris la prophylaxie post-exposition, devrait être garanti, conformément aux directives de l’OMS;
- Les soins pour les viols devraient être dispensés à partir des nombreux modèles existants fondés sur des preuves et adaptés à une situation donnée, avec des connexions multisectorielles;
- Les jeunes femmes et jeunes hommes doivent être encouragés à participer activement aux campagnes de prévention du VIH qui intègrent concrètement la prévention de la violence sexiste et une approche soucieuse de l’égalité des sexes;
- Des programmes doivent être élaborés pour lutter contre les niveaux élevés de violence et les risques de VIH y relatifs encourus par les adolescents qui vendent du sexe;
- Les programmes doivent reconnaître que les travailleurs du sexe subissent des violences infligées de nombreuses sources, comme les clients, les propriétaires de maisons closes ou autres intermédiaires qui contrôlent l’accès des clients aux travailleurs du sexe ou l’accès des travailleurs du sexe aux clients (contrôleurs) et agents de l’ordre public. Les auteurs de violence incluent également les partenaires de longue date, les parents, les voisins et autres membres de la communauté.
- Les interventions programmatiques ne devraient pas cibler simplement les travailleurs du sexe, mais aussi tous ceux qui s’intéressent aux activités liées au sexe, à la prévention de la violence à l’égard des femmes et du VIH, notamment les agents de la force publique, les clients, les partenaires, les contrôleurs et les familles;
- Des interventions doivent également s’attaquer à la stigmatisation et à la discrimination dont sont victimes les travailleurs du sexe dans la communauté en général, les médias, la législation et les politiques publiques;
- Les programmes devraient comporter un élément de suivi et d’évaluation efficace permettant de renforcer la base de données factuelles nécessaires pour examiner les intersections de la violence à l’égard des femmes et du VIH et du sida;
- Il est important d’analyser l’égalité des sexes et la diminution des incidences de la violence à l’égard des femmes comme un phénomène positif et les indicateurs de résultats liés à la diminution de risques de VIH;
- Il importe également d’analyser l’incidence accrue de la violence à l’égard des femmes comme une possible conséquence nuisible des interventions liées au VIH;
- La préparation des rapports devrait s’améliorer de sorte qu’il existe une méthode systématique d’évaluation de l’ampleur et de la progression ou de la détérioration dans la forme et niveau de violences à l’égard des femmes, notamment les violences physiques.
Source: extraits et légèrement adaptés de Addressing Violence against Women and HIV/AIDS: What Works? (OMS et ONUSIDA, 2010).
Réforme législative et politique
- Le succès de l’intégration d’actions programmatiques de lutte contre le VIH et le sida, et la violence à l’égard des femmes, est subordonné à l’engagement sans réserve des pouvoirs publics de protéger et d’encourager le respect des droits des femmes pour ce qui est de la violence et de la prévention, du traitement et des soins du VIH/sida, notamment dans les domaines suivants:
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Recommandations politiques |
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Violence à l’égard des femmes |
Violence et VIH |
VIH |
Réforme juridique et politique
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Source: J. Ward, 2008. “Designing Programming to Address GBV and HIV in East, Central and Southern Africa: A Framework for Action”, projet de document de travail, FNUAP, Nairobi.
Recommandations législatives
La législation devrait aborder directement les questions de violence sexuelle et familiale et de VIH et de sida, en plus des autres sujets relatifs aux droits civils et politiques (mariage, succession, biens) qui peuvent contribuer à la diminution des risques et au renforcement de la protection des femmes de la violence et des dangers de contracter le VIH.
Bien que pénalisées dans certains pays en vue de protéger les femmes, la transmission et l’exposition au VIH constituent non seulement une violation des droits de la personne mais se sont révélées particulièrement préjudiciables aux femmes des manières suivantes:
- Les femmes seront dissuadées de faire appel aux services de prévention, de traitement et de soins du VIH, notamment le dépistage pour le VIH;
- Les femmes sont plus susceptibles d’être tenues pour responsables de la transmission du VIH;
- Les femmes seront plus exposées aux risques de violences et de sévices liés au VIH;
- La pénalisation de l’exposition ou de la transmission du VIH ne protège pas les femmes de la coercition ou de la violence;
- Les droits des femmes à faire des choix avisés en matière sexuelle et reproductive seront réduits;
- Les femmes sont plus susceptibles d’être poursuivies en justice;
- Certaines femmes pourraient être poursuives pour la transmission de la mère à l’enfant;
- Les femmes seront plus exposées à la transmission du VIH;
- Les femmes les plus “exposées et marginalisées” seront les plus touchées;
- Les interventions respectueuses des droits de la personne sont les plus efficaces contre le VIH.
Pour des explications sur chacun de ces points, veuillez télécharger l’intégralité du document en allemand, anglais, espagnol, français, népalais, polonais, portugais et russe.
Source: extraits de Athena Network, 2009. 10 Reasons Why Criminalization of HIV Exposure or Transmission Harms Women.
Des réformes législatives ou de nouvelles dispositions juridiques sont nécessaires dans les domaines suivants :
- Droit civil (ordres de protection, indemnisation)
- Droit pénal (consentement)
- Preuves et procédures (confirmation, règles en matière de caution, dossiers et faits)
- Condamnation (peines minimales, délits aggravants et circonstances atténuantes)
Pour des directions détaillées sur la législation, veuillez consulter les instruments ci-dessous et le module intégral sur la législation en anglais, français et espagnol.
Étude de cas : Formation innovante sur le VIH/sida, la violence sexuelle et le droit au Rwanda
Pour lutter contre la violence sexuelle perpétrée au cours du génocide de 1994 au Rwanda, l’organisation non gouvernementale WE-ACTx (Women’s Equity in Access to Care and Treatment) a lancé un programme juridique sur les droits des personnes vivant avec le VIH/sida au Rwanda. Cette ONG a parrainé un atelier de formation de huit semaines pour renforcer les compétences des auxiliaires juridiques et des animateurs communautaires des 24 ONG locales partenaires de WE-ACTx, qui soignent des milliers de clients séropositifs au VIH. Cette formation a été la première de ce type au Rwanda à porter sur le sujet du VIH et du sida avec une subdivision consacrée à la violence sexuelle. WE-ACTx a organisé cet atelier comme suite directe aux demandes de clients et du personnel des ONG partenaires pour une formation sur les stratégies juridiques en matière de VIH. Une équipe de trois juristes bénévoles des États-Unis et d’Europe spécialisés dans les droits universels de la personne, les aspects juridiques relatifs aux femmes et la violence sexuelle ont collaboré avec des organisations qui participent à la lutte contre le VIH et défendent les droits des victimes de ce fléau, des juristes rwandais, des écoles de droit rwandais, des équipes d’auxiliaires juridiques et plusieurs ONG actives dans la réforme du système juridique rwandais. Les Ministères rwandais de la justice et de la condition féminine et des représentants des organismes de lutte contre le sida ont également apporté leur concours.
L’examen du module sur la violence sexuelle a permis aux participants d’apprendre comment intervenir et aider un enfant victime de la violence sexuelle, notamment la sauvegarde des éléments de preuves, et comment utiliser la permanence téléphonique pour sévices à enfant. Les participants ont également appris et se sont exercés sur les moyens de renforcer la sécurité et la confidentialité du processus gacaca pour convaincre les femmes de témoigner contre leurs violeurs devant ces tribunaux locaux chargés de juger les actes de génocide. WE-ACTx a collaboré avec des partenaires rwandais à la production d’un manuel, Know Your Rights: HIV/AIDS and the Law (Connaissez vos droits: VIH/sida et la loi), qui vise à faciliter l’accès des auxiliaires juridiques et de leurs clients au système judiciaire. WE-ACTx a également réaffirmé l’importance de la coopération avec le Ministère de la condition de la femme et les milieux universitaires pour étendre le programme juridique aux zones rurales, aux fonctionnaires municipaux, aux magistrats et aux représentants de la santé publique, et pour inclure la formation des autorités locales dans la lutte contre la discrimination et l’adoption de législations contre la violence sexuelle.
Pour plus de renseignements sur le programme WE-Act x, veuillez contacter Megan McLemore à: meegwie@gmail.com ou Anne-Christine d’Adesky à: acd@we-actx.org.
Source: extraits de Global AIDS Alliance, 2006. Zero Tolerance: Stop the Violence Against Women and Children, Stop VIH/AIDS. Washington: Global AIDS Alliance, p. 22.
Instruments de référence:
Legislation Contagion: Building Resistance (R. Pearhouse /Canadian HIV/AIDS Legal Network, 2008). HIV/AIDS Policy & Law Review. Vol.13, No.2/3, décembre, 1 et 5-10. Disponible en anglais.
Respect, Protect and Fulfill: Legislating for Women’s Rights in the Context of HIV/AIDS – Volume One:: Sexual and Domestic Violence ( Réseau juridique canadien VIH/sida, 2009). Disponible en anglais.
Respect, Protect and Fulfill: Legislating for Women’s Rights in the Context of HIV/AIDS – Volume One: Sexual and Domestic Violence Module 1: Rape and Sexual Assault (Réseau juridique canadien VIH/sida, 2009). Disponible en anglais.
Respect, Protect and Fulfill: Legislating for Women’s Rights in the Context of HIV/AIDS – Volume One: Sexual and Domestic Violence Module 2: Domestic Violence ( Réseau juridique canadien VIH/sida, 2009). Disponible en anglais.
Outils supplémentaires:
Zero Tolerance: Stop the Violence Against Women and Children, Stop HIV/AIDS (Global AIDS Alliance, 2006). Disponible en anglais.
Scaling Up for Zero Tolerance: Civil Society Leadership in Eliminating Violence Against Women and Girls in Ghana, Rwanda and South Africa (Global AIDS Alliance, 2008). Disponible en anglais.
Reducing Women’s and Girls’ Vulnerability to HIV/AIDS by Strengthening their Property and Inheritance Rights (Centre international de recherche sur les femmes, 2006). CIRF, Washington. Disponible en anglais.
Estrategias nacionales sobre VIH y violencia contra las mujeres en America latina y el Caribe: un reto impostergable (D. Luciano/ Development Connections, 2007b). Disponible en espagnol.