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S’assurer de la mise en place de mesures législatives adaptées

Dernière modification: February 25, 2011

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  • Il convient que des mesures législatives appropriées soient en place pour que le secteur de la santé puisse élaborer et offrir des services intégrés. Certaines de ces mesures peuvent viser de manière générale les questions relatives à la violence à l’égard des femmes alors que d’autres peuvent être plus spécifiquement axées sur les services de santé pour les victimes. Les personnes qui souhaitent l’amélioration des programmes de santé devraient procéder à l’évaluation des dispositions législatives en vigueur et, le cas échéant, s’employer à les réformer dans les domaines clés relatifs à la qualité des services et des droits des victimes (Bott, Morrison et Ellsberg, 2005a).
  • Le processus d’élaboration des mesures législatives sur la violence à l’égard des femmes est décrit en détail dans le module sur la législation. Les questions se rapportant directement au secteur de la santé ont été extraites de ce module et sont présentées ci-dessous.
  1. Examiner les lois en rapport avec le secteur de la santé et la violence à l’égard des femmes et des filles.
  • En règle générale, et quel que soit le type de violence dont il s’agit, la législation en rapport avec la santé devrait comporter une proclamation des droits des victimes qui réaffirme l’importance de la sécurité de celles-ci et de l’aide qui leur est apportée, assurer la confidentialité des documents les concernant et viser à prévenir de nouvelles violences à leur égard. La législation devrait désigner un ou plusieurs organismes chargés des services aux victimes et en fixer clairement les attributions. La législation devrait également définir avec précision les services fournis pour chaque type de violence et réaffirmer l’obligation des praticiens de santé d’offrir une gamme de services complets. Elle devrait enfin confier aux organismes de coordination, d’exécution et de financement le mandat d’assurer la mise en place, le suivi et l’évaluation de ces services.
  • Éléments clés en matière de violence domestique :
    • La législation devrait rendre obligatoire l’accès aux services de santé pour blessures corporelles consécutives à la violence ou soins de longue durée, notamment les services de santé sexuelle et reproductive, la contraception d’urgence, la prophylaxie du VIH et l’avortement médicalisé (lorsqu’il est autorisé par la loi) en cas de viol.

 

 Exemple : La loi Maria da Penha n°11.340 (2006) du Brésil (disponible en portugais et en anglais) contient la disposition suivante : L’aide accordée à une femme en situation de violence conjugale ou familiale comprendra l’accès aux services les plus avancés du point de vue scientifique et technologique, notamment les services de contraception d’urgence, la prophylaxie des maladies sexuellement transmises (MST) et du syndrome d’immunodéficience acquise (sida) et autres interventions médicales nécessaires et appropriées en cas de violence sexuelle. Chapitre 2, article 9, paragraphe 3.

 

  • La législation devrait imposer des protocoles et des formations aux prestataires de soins de santé, dont beaucoup sont les premiers à intervenir en cas de violence familiale. Une description détaillée des blessures subies par la victime aidera celle-ci à obtenir réparation en justice.

 

Exemple : La loi contre la violence à l’égard des femmes et de leurs enfants (2004) (en anglais) des Philippines fait obligation aux prestataires de services de santé, aux thérapeutes et aux conseillers qui savent ou soupçonnent que des actes de maltraitance ont été commis de consigner les déclarations des victimes et les circonstances de leur visite, d’indiquer dûment tous les préjudices physiques, affectifs et psychologiques subis, de fournir une attestation médicale gratuite de l’examen et de conserver le dossier médical de la victime. Les praticiens doivent également aviser immédiatement les victimes de leurs droits et des recours auxquels elles ont droit conformément à la législation des Philippines, ainsi que des services à leur disposition. Section 31.

 

  • La loi devrait interdire la divulgation d’éléments d’information sur les cas concrets de violence domestique aux organismes publics sans le consentement éclairé de la plaignante/survivante, celle-ci ayant eu l’occasion d’être conseillée par un avocat ou un juriste, à moins que ces éléments ne portent aucune marque d’identification (c’est-à-dire qu’ils soient présentés de manière qui ne permet pas d’identifier la victime).

 

Example: La loi contre la violence à l’égard des femmes et de leurs enfants (2004) (en anglais) des Philippines dispose ce qui suit : Confidentialité – Tous les dossiers relatifs aux cas de violence à l’égard des femmes et de leurs enfants, y compris ceux des barangay, sont confidentiels et tous les fonctionnaires et employés et les dispensaires ou hôpitaux publics et privés devront respecter le droit à la vie privée de la victime. Quiconque rendra publics ou contribuera à rendre publics, sous quelle que forme que ce soit, le nom, l’adresse, le numéro de téléphone, l’école, l’adresse professionnelle, l’employeur, ou toute autre information permettant d’identifier la victime ou un membre proche de sa famille, sans le consentement express de la victime, sera passible d’outrage à magistrat. Section 44.

 

  • La législation devrait comporter des dispositions qui prévoient la collaboration et la coopération des organismes publics actifs dans la lutte contre la violence domestique. Les membres des ONG qui fournissent des services directement aux victimes de la violence domestique devraient animer cette collaboration.

 

Exemples de nations qui exigent une coopération entre les organisations de l’État :

  • L’un des objectifs de la loi de l’Albanie sur les Mesures de prévention de la violence dans les relations familiales (en anglais) (2006) est le suivant : a. établir un réseau coordonné d’autorités responsables de la protection, du soutien et de la réhabilitation des victimes, de l’atténuation des conséquences et de la prévention de la violence domestique. Article 2.

SEC. 39. Conseil interorganisations sur la violence à l’égard des femmes et de leurs enfants (IAC-VAWC). Conformément à la politique ci-dessus mentionnée, il est décidé par la présente d’établir un Conseil interorganisations sur la violence à l’égard des femmes et de leurs enfants, ci-après dénommé le Conseil, qui sera constitué des organismes suivants : Ministère du Bien-être et du Développement social, Commission nationale sur le rôle des femmes philippines, Commission de la fonction publique, Conseil pour le bien-être de l’enfant, Ministère de la Justice, Ministère de l’Intérieur et des Gouvernements locaux, Police nationale des Philippines, Ministère de la Santé, Ministère de l’Éducation nationale, Ministère du Travail et de l’Emploi et Bureau national des enquêtes.

Ces organismes sont chargés d’élaborer des programmes et des projets visant à éliminer la violence sexiste en conformité avec leurs mandats et à mettre au point des programmes de sensibilisation de leurs employés aux besoins de leurs clientes. Le Conseil fera également fonction d’organe de contrôle des activités contre la violence sexiste…

SEC. 42. Formation des intervenants engagés dans les activités contre la violence à l’égard des femmes et leurs enfants. - Les personnels des organismes qui participent aux activités destinées à combattre la violence à l’égard des femmes et de leurs enfants devront suivre des cours et une formation pour se familiariser avec la nature, l’ampleur et les causes de la violence envers les femmes et leurs enfants, les droits et les recours judiciaires à la disposition de ceux-ci, les services et soins qui leur sont offerts, l’obligation faite par la loi aux agents de police de procéder à des arrestations et d’offrir une protection et des secours, et les méthodes de traiter les incidents violents contre les femmes et leurs enfants de manière à réduire au maximum les risques de blessure pour l’agent de police et de renforcer la sécurité de la victime ou du/de la survivant(e)….

  • La loi organique de l’Espagne relative aux mesures de protection intégrale contre la violence de genre de 2004 (disponible en espagnol et en français) contient à son article 19 les dispositions suivantes : 

Les femmes victimes de la violence de genre ont droit aux services sociaux intégrés d'attention, de secours, d'appui, d'accueil et de récupération. […] Ces services interviendront de façon coordonnée et en collaboration avec les Corps de sécurité, les juges chargés de la violence envers la femme, les services sanitaires et les institutions chargées de prêter une assistance juridique aux victimes, présentes sur le territoire géographique correspondant.  

La loi espagnole prévoit également des mécanismes de financement et d’évaluation des procédures de coordination.

 

 

Éléments clés en matière de violence sexuelle :  

  • La loi devrait reconnaître le droit des survivantes de ne pas faire l’objet, à aucun stade du processus, d’actes de discrimination fondée sur la race, le genre, l’orientation sexuelle ni toute autre caractéristique. Voir : Manuel de l’ONU, 3.1.3.
  • La loi devrait prévoir la disponibilité d’une gamme complète de services de santé permettant de traiter les conséquences physiques et psychologiques de l’agression sexuelle. Ces services devraient comprendre : un centre de secours d’urgence en cas de viol pour 200 000 habitants, des programmes pour les victimes d’agressions sexuelles, des programmes pour les témoins des victimes, des programmes pour les victimes âgées, des numéros d’urgence pour les victimes d’agressions sexuelles, et des programmes pour les victimes d’inceste. Voir : Manuel de l’ONU 3.6.1 et 3.6.2. La loi devrait prévoir également un mécanisme de diffusion d’informations sur ces questions aux victimes de la violence. Voir : Minnesota, Loi des États-Unis §611A.02; la Loi d’aide aux victimes de viol et de protection des victimes de viol des Philippines (1998), disponible en anglais. La loi devrait enfin stipuler que l’accès à ces services n’est ni limité ni subordonné à des conditions préalables de temps ni d’autres conditions. Voir : Organisation mondiale de la santé, Guidelines for Medico-Legal Care for Victims of Sexual Violence [Directives pour les soins médico-légaux des victimes de violences sexuelles] (2003).  Disponible en anglais.

 

Exemple : La loi de prévention et d’élimination de la violence à l’égard des femmes et de la violence sexiste de Saint-Marin (2008), disponible en anglais, exige de l’État qu’il fournisse aux victimes de ces formes de violence des services sociaux spécialisés faciles d’accès pour les victimes et employant un personnel ayant reçu une formation appropriée. Ch. 1 Art. 4

 

Leçons à retenir : Dans de nombreux pays, la loi exige que les agressions sexuelles soient déclarées à la police. Cette disposition, dite déclaration obligatoire, est la plus courante en cas d’agression sexuelle contre les enfants. Dans certains pays, il est prévu que cette déclaration précède l’accès aux services de santé, la pratique dans le secteur de la santé étant que les victimes/survivant(e)s de l’agression sexuelle soumettent une déclaration à la police avant de se faire soigner. S’il est évident que les agents de santé doivent respecter les lois de leur pays, il n’est toutefois pas souhaitable que les politiques du secteur de la santé fassent passer les besoins de la justice avant ceux de la santé. L’accès aux soins médicaux devrait avoir la priorité sur les déclarations à la police, et les politiques en matière de santé et de justice devraient l’indiquer clairement (Jewkes, 2006). Il a également été constaté que la déclaration obligatoire à la police a des effets dissuasifs qui font que les femmes hésitent à se faire soigner et que les prestataires de services s’abstiennent de poser des questions ayant trait à la violence par crainte de se voir impliqués dans des procédures judiciaires (Velzeboer, 2003).

  • La législation devrait stipuler que les coûts de l’examen médico-légal nécessaire à la collecte et garde des preuves d’activité sexuelle criminelle seront pris en charge par un organisme public de l’endroit où l’agression sexuelle a été commise. Voir Sexual Offences Act (2003) of Lesotho, Part VI, 21 (1).
  • La collecte de preuves scientifiques devrait être décentralisée. Les activités de prélèvement d’ADN, les examens de santé et la préparation des rapports devraient être confiés à un personnel médical plus nombreux et plus diversifié sur le plan professionnel, comme les infirmiers et les sages-femmes, ainsi que les médecins (Kilonzo, 2008a). L’expérience montre que les examens médico-légaux effectués par des infirmiers ont permis de réduire les délais d’attente et d’analyse des résultats, d’augmenter la production de trousses médicolégales pour les cas d’agression sexuelle, de les rendre plus fiables et plus exhaustives, de renforcer la chaîne de preuves et de responsabilités, d’aider les  représentants de la force publique à réunir des informations et à porter ou déposer plainte, et d’améliorer les chances de poursuites judiciaires et de condamnations (extrait de J. Du Mont et D. White, 2007. The Uses and Impact of Medico-legal Evidence in Sexual Assault Cases: A Global Review. (Utilisations et impact des preuves médicolégales en cas d’agression sexuelle: Un examen global) (Genève, OMS, p.37). Ces mesures doivent être suivies par leur mise en pratique par d’autres parties intéressées compétentes (procureurs)  pour garantir que les pièces à conviction sont examinées et utilisées.

Leçons tirées: De nombreux pays réservent la collecte de preuves médicolégales à des médecins spécialement habilités, comme les chirurgiens de district ou les médecins légistes. Leur nombre limité et leur manque de disponibilité posent problème aux femmes qui souhaitent pouvoir utiliser ce genre de services. Elles sont souvent obligées de patienter très longtemps ou de suivre des chemins tortueux pour obtenir les soins dont elles ont besoin. Dans certaines situations, les examens médicolégaux sont utilisés (de manière peu fiable) pour déterminer si une fille ou une femme a perdu sa virginité – élément de preuve susceptible de servir comme pièce à conviction (Human Rights Watch, 1999; Brown, 2001). Certains pays s’efforcent désormais de développer et de fournir de meilleurs services, notamment par la professionnalisation et la formation de personnel médical supplémentaire.

  • La législation devrait garantir la gratuité et le libre accès aux examens pour maladies sexuellement transmises, la contraception d’urgence, les examens de grossesse, les avortements et  la prophylaxie post-exposition (PEP). La prophylaxie post-exposition (PEP) est un traitement antirétroviral administré dans des délais très brefs qui vise à réduire les chances d’infection à VIH causée par une possible exposition, dans le cadre du travail ou pendant les rapports sexuels. D’après l’Organisation mondiale de la santé. Voir: Stefiszyn – A Brief Overview of Recent Developments in Sexual Offences Legislation in Southern Africa (Aperçu sommaire des récents développements législatifs en matière de délits sexuels en Afrique australe), document d’experts préparé en vue de la réunion du Groupe d’experts sur les bonnes pratiques législatives en matière de violence à l’égard des femmes, mai 2008.

 

Exemple : L’Amendement à la législation pénale (délits sexuels et questions connexes) (no.32) de l’Afrique du Sud stipule que toute victime rapportant un acte d’agression sexuelle à la police ou à un médecin devra recevoir des informations sur les maladies sexuellement transmises et l’importance de la prophylaxie post-exposition (PEP) dans les 72 heures qui suivent l’agression. Ch. 5, 28 (3).
Exemple : Dans une décision de 2010, la Cour suprême du Mexique a confirmé la Norma Oficial Mexicana (NOM-046-SSA2-2005) Violencia familiar, sexual y contra las mujeres qui enjoint tous les États de la Fédération de distribuer le contraceptif oral d’urgence et de faciliter l’accès à l’avortement médicalisé des victimes de viol.

 

  • La législation devrait garantir une intervention coordonnée de la communauté  pour les victimes d’agressions sexuelles. Voir: Intervention coordonnée d’urgence. StopVAW, the Advocates for Human Rights (Faire cesser la violence à l’égard des femmes, les Défenseurs des droits de la personne).
  • La législation devrait prévoir la constitution d’équipes ou l’élaboration de programmes d’intervention coordonnée en cas d’agressions sexuelles afin d’offrir aux victimes toute la gamme de soins et de services indispensables (juridiques, médicaux et sociaux) et d’augmenter les chances de poursuites judiciaires contre de tels actes. Les programmes et équipes devraient comprendre un expert légiste, un défenseur des victimes des agressions sexuelles, un procureur, et un représentant des forces de l’ordre. Tous les participants devront observer les protocoles qui fixent leurs attributions en matière de soins et de prestation de services aux victimes d’agressions sexuelles. Voir:
    • La législation devrait prévoir un financement réservé  à la constitution d’équipes de prestataires de services pour les victimes d’agressions sexuelles, aux frais d’enregistrement professionnel et à l’organisation de  formations à leur intention. Voir: Good Practices in legislation on – harmful practices against women (2010) (Bonnes pratiques législatives – mauvaises pratiques législatives à l’égard des femmes). 3.4.2. et 3.4.3.
    • La législation devrait inclure toutes les dispositions nécessaires à l’application intégrale des législations en matière d’agression sexuelle, notamment le développement de protocoles, de règlements et de formulaires uniformisées indispensables à l’application des lois. La législation devrait exiger que le développement de ces protocoles, règlements et formulaires intervienne dans les mois suivant l’entrée en vigueur de la loi, et fixer un délai entre l’adoption d’une loi sur l’agression sexuelle et la date de son entrée en vigueur. Voir UN Handbook (Manuel de l’ONU) 3.2.6 et 3.2.7.
    • La législation devrait stipuler que le contrôle de l’application des lois sur les agressions sexuelles et la collecte périodique de données sur ces actes seraient confiés à un organisme particulier. Voir: UN Handbook (Manuel de l’ONU) 3.3.1 et 3.3.2. 

 

Exemple: La loi sur les délits sexuels (no.3) (2006) du Kenya comporte la disposition suivante: - Le(La) Ministre devra (a) établir un cadre politique national de supervision de l’application et de l‘administration de cette Loi afin de pouvoir pourvoir des soins satisfaisants et uniformes à toutes les victimes  de délits de nature sexuelle, notamment le traitement et les soins fournis aux victimes d’agressions sexuelles; (b) réexaminer le cadre politique au moins tous les cinq ans; et (c), y apporter des modifications,  s’il y a lieu. Section 46.

 

Instruments supplémentaires :

Voir Tools for Developing Legislation on Domestic Violence and Tools for Drafting Legislation on Sexual Assault in the module Developing Legislation on Violence Against Women and Girls (Instruments de développement de législation sur la violence familiale et Instruments de rédaction de législation sur l’agression sexuelle du module Développement de législation sur la violence à l’égard des femmes). Le module fournit également des indications sur la législation liée à le harcèlement sexuel, à la traite et à l’exploitation sexuelle, aux pratiques nuisibles, au mariage forcé et précoce, à la mutilation ou l’excision génitales féminines, aux crimes d’honneur, à la maltraitance des veuves et à la violence liée à la dot.

 

2. Animer la mobilisation pour améliorer la législation.

  •  Les actions de mobilisation sont souvent interprétées à tort comme synonyme de stratégies de communication visant la modification des comportements (BCC), de stratégies d’information, d’éducation et de communication (IEC) et/ou d’actions communautaires. S’il est vrai que ces actions visent à encourager les changements et supposent le développement de messages destinés à divers publics, l’action de  mobilisation s’en distingue du fait que son objectif final est le changement d’orientation politique. Le processus de mobilisation est mené à son terme lorsqu’un décideur adopte la ligne politique préconisée. Bien qu’un aspect important de ce processus, la sensibilisation du grand public n’en est pas l’objectif majeur. 

 

  • L’action collective est souvent bien plus efficace que l’action individuelle, et les revendications exprimées collectivement permettent d’éviter le risque de représailles contre un individu ou une organisation, surtout s’il s’agit d’une question controversée ou délicate. C’est pourquoi il vaut souvent mieux que les actions de mobilisation soient menées de manière coordonnée par un collectif des principales parties intéressées organisé, par exemple, sous la forme d’une coalition. Le personnel médical devrait développer et appliquer des stratégies de sensibilisation dans le cadre d’un mécanisme de coordination. 

 

  • Le tableau ci-après donne un aperçu rapide des étapes d’une stratégie de sensibilisation (extrait de Ward, 2010 et adapté d’après le Centre pour le développement et les activités en matière de population, 2000).

 

 

Collecte de données Suivi et Évaluation

1ère ÉTAPE: Les partenaires examinent la QUESTION à laquelle ils souhaitent donner une autre orientation politique. La question est clairement définie, bien comprise et jugée importante par les partenaires.

2e ÉTAPE: Les partenaires fixent un BUT pour la sensibilisation (à moyen ou long terme avec des changements éventuels) ET DES OBJECTIFS (à court terme, concrets, quantifiables) s’inspirant de la question étudiée.

3e ÉTAPES: Les partenaires désignent L’AUDIENCE ciblée par cette action: les décideurs qui ont l’autorité de modifier les orientations politiques.

4e ÉTAPE: Les partenaires choisissent des interlocuteurs qualifiés en matière de sensibilisation (en collaboration peut-être avec un sous-groupe de coordination), développent un MESSAGE de sensibilisation incontestable et l’adaptent aux centres d’intérêt de l’audience ciblée.

5e ÉTAPE: Les partenaires désignent les COURANTS DE COMMUNICATION les plus adaptés pour diffuser le message de sensibilisation à l’audience ciblée. Cette action peut revêtir la forme d’une conférence de presse, d’une note d’information aux cadres de direction, d’un débat, d’une réunion avec les décideurs politiques, etc.

6e ÉTAPE: Les partenaires s’efforcent d’élargir L’ADHÉSION des membres de la société civile et d’autres partenaires.

7e ÉTAPE: Les partenaires RÉUNISSENT DES FONDS et mobilisent autres moyens de soutien à la campagne de sensibilisation.

8e ÉTAPE: Les partenaires EXÉCUTENT leur stratégie de sensibilisation suivant un Plan d’action.

La collecte de données accompagne le processus de sensibilisation de manière continue et peut inclure des activités de recherche sur l’attitude de l’audience ciblée sur la question à l’étude. 

Les activités de suivi et d’évaluation se déroulent tout le long du processus de sensibilisation. Les militants devront décider avant le lancement de la campagne des moyens à utiliser pour surveiller sa mise en application. En outre, les membres du groupe devront décider comment évaluer ou mesurer les résultats. Peuvent-ils véritablement espérer pouvoir provoquer un changement de politique, de programme ou de financement par leur action? Comment le groupe saura-t-il que la situation a changé?

 

Étude de cas : The South African Gender-Based Violence and Health Initiative (SAGBVHI) (Initiative sud-africaine sur la violence liée au sexe et la santé)

Les coalitions du secteur de la santé ont un rôle important à jouer dans la mobilisation pour la réforme des politiques et des institutions publiques. À titre d’exemple, The South African Gender-Based Violence and Health Initiative (SAGBVHI) réunit 15 partenaires associatifs et individuels d’Afrique du Sud. Ils effectuent des recherches, renforcent les capacités de recherche, en diffusent les conclusions et les utilisent pour plaider en faveur de réformes politiques. La SAGBVHI coopère étroitement avec les Gender and Women’s Health Directorates (départements de la condition féminine et de la santé de la femme) du National Department of Health (Ministère de la Santé). L’influence de ces réseaux est difficile à juger, mais, d’après des évaluations officieuses, le travail de la SAGBVHI a abouti à des réalisations notables. C’est ainsi qu’elle a convaincu deux écoles de médecine de renforcer leurs programmes sur la violence sexiste, participé au développement d’un module d’une semaine sur le viol destiné aux étudiants en médecine, et à l’adoption de nouvelles politiques nationales sur la violence liée au sexe et la santé. Leurs activités illustrent comment la coopération des milieux de recherche et des pouvoirs publics contribue à transposer les conclusions théoriques en action politique (Medical Research Council, 2003; Guedes, 2004).

Extrait de S. Bott, A. Morrison, M. Ellsberg, 2005a. Preventing and Responding to Gender-Based Violence in Middle and Low-income Countries: A Global Review and Analysis. World Bank Policy Research Working Paper 3618, p. 28 (Prévention et intervention en matière de violence sexiste dans les pays à faible revenu et revenu intermédiaire: Examen et analyse générale. Document de recherche politique de la Banque mondiale 3618, p.28.

 

Pour de plus amples renseignements sur la mobilisation sur les réformes législatives, voir  Actions de mobilisation pour une nouvelle législation ou pour la réforme de la législation en vigueur dans le module  Législation.

Instruments supplémentaires:

Women Leadership Program Initiative for Equity Tanzania (2003). Ce manuel  fournit au personnel sanitaire et aux formateurs un examen exhaustif d’une formation d’animateurs sur la violence liée au sexe (VBS). La formation permet de renforcer la capacité de la collectivité d’agir comme un facteur de changement, avec des sujets comme les concepts sexospécifiques, les liens entre la violence liée au sexe ou la violence à l’égard des femmes et les droits de la personne, la communication en matière de sensibilisation à la violence sexiste et le développement de plans d’action pour la mise en place de réseaux. Les objectifs, programmes, résultats et méthodologies de facilitation de l’atelier, ainsi que son évaluation sont fournis comme référence pour la formation. Disponible en anglais; 52 pages.  

 

Gender, Reproductive Health and Advocacy (Centre pour le développement et les activités en matière de population, 2000). Collection de guides de formation. (Sessions 9 – 14). Disponible en anglais.

 

3. Vérifier que les lois sont appliquées.

  • Faute d’une application effective, même les meilleures lois ne pourront prévenir la violence ou en protéger les victimes. Le viol est parmi les crimes les moins sanctionnés dans le monde. En moyenne, seuls 10% des actes de violence rapportés aboutiront à une condamnation et, dans de nombreux cas, ce taux risque même d’être plus faible (Amnesty International, 2004, cité dans USAID et UNICEF, 2006; Johnson et al. 2008; Vetten et al. 2008; et Lovett et Kelly 2009). 

 

Dans certains pays en développement notamment, le viol conjugal n’est pas considéré comme un crime. Et même dans les pays dotés de lois qui sanctionnent les actes de violence perpétrées par les partenaires intimes, ceux-ci sont souvent ignorés, n’entraînent que des peines légères qui ne sont appliquées que parcimonieusement ou sont récusés par le droit coutumier, qui conseille souvent aux maris l’utiliser une certaine violence pour discipliner leurs femmes (Center for Reproductive Law and Policy, 2001, cité dans USAID et UNICEF, 2006).

 

  • Les contraintes budgétaires, la faible volonté politique et le soutien populaire insuffisant pour les droits des femmes, conjugués au manque de qualifications des avocats et des juges dans la mise en pratique des législations, des politiques et des protocoles dans ce domaine contribuent à ralentir également  l’application des dispositions de protection. Qui plus est, de nombreuses femmes sont privées d’informations relatives à leurs droits et aux moyens de saisir le système judiciaire lorsque leurs droits sont violés (USAID et UNICEF, 2006).

 

  • Il incombera par conséquent au secteur de la santé de vérifier que les législations sur les droits des victimes aux soins de santé et les obligations des prestataires de services de santé dans ce domaine sont proprement appliquées. Pour ce faire, le personnel médical devra recevoir une formation sur les obligations que leur imposent les législations en la matière, les  collectivités devront connaître leurs droits, la disponibilité et la gamme de services fournis,  et la prestation de services et la qualité des soins devront faire l’objet d’un contrôle continu. Pour de plus amples renseignements sur l’application des législations voir le module Élaboration de dispositions législatives sur la violence à l’égard des femmes.