Il incombe aux États de s’acquitter au mieux de leur mandat, en fonction des ressources et des capacités dont ils disposent, pour prévenir la violence à l’égard des femmes, satisfaire l’ensemble des besoins des survivantes de la violence, et poursuivre en justice les auteurs de violences. Cette obligation est connue comme la norme de “diligence requise”. (Nations Unies, 2006). La norme de diligence requise a été établie par la Recommandation générale no.19 du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, qui stipule qu’il appartient aux États de combattre l’inégalité structurelle entre les sexes et la discrimination qui engendre et perpétue la violence à l’égard des femmes, et de veiller à ce que des mesures soient prises pour prévenir les actes individuels de violence et pour intervenir le cas échéant.
La capacité des États à satisfaire la norme de diligence requise et à renforcer leur obligation de rendre compte de leurs actions destinées à mettre fin à la violence à l’égard des femmes est subordonnée à l’élaboration d’une approche holistique multisectorielle pour assurer une évaluation exhaustive des besoins et des droits interdépendants des survivantes de la violence et l’intégration de mécanismes d’action et de prévention dans toutes les stratégies et programmes.
Les approches multisectorielles supposent une coordination intersectorielle des ressources et des actions, en collaboration avec les institutions de l’État et la société civile. (Assemblée générale de lONU, 2008; AusAID, 2008; Commonwealth Secretariat, 2003; Morrison, 2004) La mise en application de telles approches, utilisées dans le cadre d’un dispositif politique de lutte contre la violence à l’égard des femmes, aura pour conséquence:
- De faciliter l’application effective de la législation nationale.
- De proposer un mécanisme d’allocation et de suivi des ressources.
- D’encourager le sens des responsabilités des organismes intéressés par une description détaillée de leurs attributions et la définition d’objectifs limités dans le temps sous surveillance.
- De veiller que les principaux services de première ligne (santé, police et justice) sont bien équippés, intégrés et d’accès facile aux survivantes de la violence, et que les services de prévention s’adressent équitablement aux deux sexes.
- Engager les autres secteurs qui ne sont pas normalement inclus dans l’approche multisectorielle mais qui ont un rôle essentiel à jouer dans la prévention et l’action contre la violence à l’égard des femmes, notamment, l’éducation, les affaires sociales, la jeunesse, la main d’œuvre, la planification urbaine, la défense et les ministères des finances et de la planification.
Un cadre intégré prévoit la fourniture d’un certain nombre de services de santé, de protection et juridiques indispensables aux victimes de la violence et qui ne peuvent pas être livrés par un seul secteur ou une seule action. L’approche intégrée renforce les activités de mobilisation, intensifie à terme la collaboration intersectorielle, améliore l’efficacité et la portée des services et des activités de prévention; et utilise au mieux la compétence technique, les ressources et les investissements consentis à cette fin. La mise en place d’un cadre national passe par l’adoption de mesures énergiques de coordination intégrée et d’investissements destinés à développer les capacités des dispositifs de protection de la femme ou de l’organisme chargé d’assumer ce rôle.
Les services et interventions suivantes sont au cœur d’un plan d’action national contre la violence à l’égard des femmes :
- Création d’un numéro d’urgence et/ou d’un service téléphonique d’urgence gratuit et permanent pour signaler des cas de maltraitance et des situations mettant la vie en danger, avec des effectifs de conseillers compétents capables d’orienter leurs correspondants sur les services adaptés.
- Fourniture de services “de première ligne” de qualité - assistance médicale et psychosociale gratuite, intervention des forces de sécurité et/ou de police et assistance judiciaire et/ou juridique, qui constituent un ensemble de services d’assistance de base aux survivantes de la violence. Ces services, qu’ils soient fournis par les autorités nationales et/ou les organisations non-gouvernementales, devront être multisectoriels et concertés (par l’intermédiaire de mécanismes d’action communautaire coordonnée, d’un guichet unique, ou d’un réseau d’orientation développé) et proposés aux victimes de la violence dans des délais raisonnables, réduisant ainsi les risques et les probabilités de nouveaux sévices. L’assistance accordée dans la durée aux victimes de la violence contribue également à atténuer les conséquences des mauvais traitements.
- Actions visant à accroître la demande de services et à inciter les femmes maltraitées à se manifester. Ces actions passent par l’évaluation des besoins et des expériences vécues des survivantes de la violence (y compris celles appartenant à des groupes spécifiques et à des communautés marginalisées) et l’examen d’innombrables obstacles économiques, sociaux et culturels qu’elles doivent surmonter pour signaler les sévices subis et pour utiliser les services d’assistance médicale, sociale et juridique à leur disposition.
- S’engager dans les activités de prévention primaire au niveau individuel, relationnel, communautaire et sociétal pour prévenir la maltraitance avant qu’elle ne se produise. Cela passe par l’adoption de mesures destinées à modifier les critères et attitudes sexistes qui tolèrent la violence à l’égard des femmes et la mise en place de mécanismes appropriés de suppression de l’impunité, ce qui peut entraîner à terme un changement comportemental.
- Fournir des abris et des locaux protégés dans les zones urbaines et rurales accessibles aux femmes (et leurs enfants). Certains experts recommandent la création d’un abri pour 10.000 habitants environ, en fonction des capacités locales d’assurer l’accessibilité équitable à l’ensemble de la population, mais de sorte que toutes les femmes, même des régions à faible population, puissent accéder facilement à un espace protégé. (d’après le Conseil de l’Europe, 2008) Dans les régions à faible revenu, des méthodes innovantes ont été utilisées comme la construction de logements par des volontaires ou financés par les réseaux communautaires, ou la création d’espaces protégés attenants aux maisons des chefs de village, aux établissements hospitaliers ou aux organisations confessionnelles. Dans d’autres situations (certains pays d’Europe) une série de lois récemment adoptées stipulent l’obligation des autorités d’éloigner du foyer l’auteur de violence et de lui signifier une ordonnance de protection (de manière que la femme et ses enfants ou autres dépendants continuent de vivre dans leur maison en toute sécurité).
- Former des groupes d’assistance et d’auto-assistance au service des femmes et mettre en place des services de conseil, avec au minimum un centre pour 50.000 femmes, répartis suivant le nombre d’habitants, mais de sorte que toutes les femmes, même des régions à faible densité de population, puissent y accéder facilement. (d’après le Conseil de l’Europe, 2008) Les groupes d’assistance au service des femmes pourront fonctionner comme des entités autonomes ou à l’intérieur de postes de police, de centres de santé ou d’autres lieux où les femmes sollicitent une aide. Les services d’assistance devront pouvoir offrir des soins post-traumatiques, accompagner les femmes au tribunal ou leur proposer toute autre forme d’assistance susceptible de leur faciliter l’accès à la justice, à la planification protégée, aux autres soins de santé, aux services de police et juridique, et leur donner la confiance et l’aide suffisantes pour poursuivre leur action en justice et ne pas retourner chez le partenaire qui les maltraite.
- S’il y a lieu, la mise en place, sous étroite surveillance, de programmes à l’intention des auteurs de violence à l’égard des femmes. Pour des indications sur la question, veuillez consulter la section perpetrator du module Hommes et Garçons.
Ressources Supplémentaire
Generale
Handbook for National Action Plans on Violence against Women (ONU Femmes, 2011). Disponible en Anglais.
L'engagement des États: les plans et les politiques à éradiquer les champs violence contre les femmes en Amérique latine et dans les Caraïbes (UN Women, UNiTE, MDG-F and UNDP). Disponible en anglais et espagnol.
The Secretary-General’s In-depth Study on Violence against Women (United Nations General Assembly, 2006). Disponible en Arabic, Chinese, English, French, Russian and Spanish.
Combating Violence against Women: Minimum Standards for Support Services (Council of Europe, 2008). Disponible en Anglais.
Hotlines / Services d'assistance téléphonique
Field Guide: Setting Up a Hotline (Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health Center for Communication Programs, 2003). Disponible en English.
refuges
Away from Violence: Guidelines for Setting Up and Running a Women's Refuge (Women Against Violence Europe, 2004). Disponible en English.
Thinking Shelter Online Training Course (Washington State Coalition against Domestic Violence). Disponible en English.
Model Policy on Shelter Rules (Washington State Coalition against Domestic Violence). Disponible en English.
World Conference on Shelters 2008 Presentations:
- Getting Started: Challenges and Lessons
- Ethics, Standards and Innovation
- Shelters and One Stop Centers
- Sustaining Shelters
- Sheltering Indigenous Women
- Shelter and Immigrants
- Refuge Evaluation Model
- Integrating Programming for Male Batterers with Shelter Programs
Groupes de survivants et de planification de la sécurité:
The Power to Change: How to set up and run support groups for victims and survivors of domestic violence (Women’s Aid, 2008). Disponible en English.
Safety Plan (North Carolina Coalition against Domestic Violence). Disponible en English.
Model Protocol On Safety Planning for Domestic Violence Victims with Disabilities (Washington State Coalition Against Domestic Violence, 2003). Disponible en English.
Les mécanismes de planification et de financement varient d’un pays à l’autre, mais les plus courants comportent:
- Des plans d’action nationaux spécifiques qui sont des mécanismes multisectoriels exhaustifs englobant la législation, les services (fournis par les autorités gouvernementales et les organisations de la société civile), les actions de prévention, les besoins de développement des capacités et les stratégies intersectorielles, les mécanismes de coordination (entre les pouvoirs publics et la société civile, intersectoriel et interministériel) , les allocations de ressources et la collecte de données , et les plans et mécanismes de surveillance et d’évaluation.
- Des cadres politiques et de financement pilotes dans le domaine de la réduction de la pauvreté (comme les stratégies de réduction de la pauvreté), des plans nationaux de développement ou d’action liés à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement, au VIH et au sida ou à la mortalité maternelle, et à d’autres points d’ancrage politiques (comme l’emploi, la migration, la jeunesse, etc.) qui peuvent servir comme des mécanismes de vérification utiles de la mise en application effective des engagements, en plus des plans et des budgets pour chaque secteur.
- Des approches sectorielles dans les domaines de la santé, de l’éducation, de la justice, de la sécurité et d’autres secteurs peuvent faire pendant aux plans d’action nationaux spécifiques de lutte contre la violence à l’égard des femmes (en garantissant l’intégration d’actions conformes au cadre multisectoriel) ou offrir un mécanisme alternatif de mise en application des engagements législatifs et politiques (même lorsqu’il n’y a pas de plan d’action national). L’intégration de programmes et de ressources clés destinés à combattre la violence à l’égard des femmes dans les plans sectoriels et les réaménagements sectoriels (comme la santé, la sécurité et l’éducation) facilite la localisation des allocations, des dépenses et de la fourniture de services.
- Plans d’action humanitaires et cadres de relèvement rapide (y compris les plans d’action nationaux s’appuyant sur la résolution 1325 du Conseil de sécurité) constituent des mécanismes influents dans la planification, la coordination et le financement des services fournis dans les situations d’urgence et d’après-conflit, et pourront être développés de manière à renforcer les capacités nationales de prévention et d’action en réponse à la violence à l’égard des femmes. La coordination multisectorielle des organismes engagés dans les opérations humanitaires offre une excellente occasion de financer directement les activités de ces organismes et de renforcer la société civile. L’aide technique apportée pendant la période de redressement et de développement d’après-conflit devra contribuer à accélérer le développement des capacités, et à renforcer une autre assistance technique destinée à faciliter la réalisation des engagements de l’État de mettre fin à la violence en temps de crise et tout au long de la période de redressement et de développement.
Ressources
Setting the Standard: International Good Practice to Inform an Australian National Plan of Action to Eliminate Violence against Women (Amnesty International, 2008). Disponible en anglais; et The National Plan to Reduce Violence against Women (Government of Australia, 2009). Disponible en anglais.
Model National Plan of Action Against Commercial Sexual Exploitation of Children (ECPAT, 2008). Disponible en English.
Planes y Presupuestos Pro-equidad de Género en Municipios Rurales: Metodología e Instrumentos Técnicos (ACOBOL, UNIFEM, UNDP and GTZ, 2006). Disponible en Spanish.
Assistance for the Implementation of the ECOWAS Plan of Action against Trafficking in Persons Training Manual (UNODC, 2006). Dispobnible en Anglais.
Making the grade: A model national policy for the prevention, management and elimination of violence against girls in school (ActionAid, 2009). Disponible en English.
Sector Wide Approaches: A Resource Document for UNFPA Staff (HLSP Institute, 2005). Disponible en English.
Gender in Local Government A Sourcebook for Trainers (United Nations Human Settlements Programme, 2008). Disponible en English and Portuguese.
Qué son y cómo se emplean los enfoques sectoriales: Una Vía para la Armonización de la Ayuda Oficial al Desarrollo (HLSP, 2005). Disponible en Spanish.
See also the Secretary-General’s Database on Violence against Women for illustrative national action plans (go to advanced search and filter by country).