Présenter ou réformer une législation favorable à l'élimination de la violence à légard des femmes

Dernière modification: October 31, 2010

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 La législation fournit un cadre normatif à la société et pose les jalons de la mise en place de politiques et de programmes de prévention et d’action contre la violence à l’égard des femmes. La législation définit les droits et les privilèges, les devoirs et les obligations des gouvernements, et constitue la base de référence des mécanismes de surveillance et le cadre de  responsabilisation nationale.

Le cadre législatif définit le contexte de violence à l’égard des femmes, stipule la portée de la loi, énumère les recours autorisés par la loi et fournit des directives sur son application, suivi et évaluation en vue d’obtenir le meilleur résultat possible. (CIRF, 2008)

Les cadres juridiques nationaux et les points de départ de la lutte contre la violence à l’égard des femmes incluent :

  • Les constitutions
  • Les dispositions législatives figurant dans les différents types de droit (civil, pénal, familial, administratif, etc.)
  • Les projets de loi autonomes, les amendements et les actes
  • La jurisprudence
  • La doctrine
  • Les décrets, règlements, protocoles et directives.

Indépendamment du cadre juridique en vigueur, la législation sur la violence à l’égard des femmes devra viser à: prévenir la violence à l’égard des femmes, garantir les ouvertures d’enquête, la poursuite en justice et la condamnation de l’auteur de la violence, et offrir une protection et une assistance aux survivantes de la violence.

La législation sur la violence à l’égard des femmes devrait s’inspirer des considérations suivantes:

  • la violence à l’égard des femmes est une forme de discrimination sexiste et une violation des droits humains des femmes;
  • la violence à l’égard des femmes est inadmissible et son élimination relève de la responsabilité collective;
  • le processus judiciaire ne doit pas porter préjudice aux survivantes de la violence;
  • la violence à l’égard des femmes doit être combattue sous toutes ses formes, dans les lieux publics et privés; et
  • l’incidence des mesures adoptées à l’égard des femmes est ressentie différemment selon l’âge, la race, la classe sociale, l’origine ethnique, la religion, la condition physique, le niveau culturel, l’appartenance aux groupes autochtones ou migrants, le statut juridique et/ou la préférence sexuelle ou autre facteur.

Éléments législatifs à examiner:

  • le préambule
  • la mise en application
  • le suivi et l’évaluation
  • les définitions
  • la prévention
  • la protection, l’appui et l’assistance aux plaignantes et/ou survivantes de la violence
  • le droit des femmes immigrées
  • les enquêtes
  • les procédures judiciaires et les preuves factuelles
  • la protection et/ou l’ordonnance de protection
  • la condamnation
  • les poursuites de droit civil
  • le droit familial
  • le droit d’asile (Division la promotion de la femme, 2008)

Stratégies à adopter :

  • Promouvoir la ratification sans réserves par les États  des instruments internationaux (comme la Convention sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et son Protocole facultatif) ou régionaux relatifs des droits de l’homme (comme la Convention interaméricaine sur la prévention, la sanction et l’élimination de la violence contre les femmes/ Convention do Belém do Parà).
  • Aligner la législation nationale sur les normes internationales et régionales relatives aux droits de l’homme conformément aux conclusions des organes créés en vertu d’instruments internationaux (en particulier la Convention pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes) de manière à intégrer, par exemple, la formulation de l’égalité des sexes dans l’élaboration et le développement d’une législation nationale sur l’égalité des sexes et sur la violence à l’égard des femmes (sous la forme de projet de loi autonome et/ou d’une disposition  intégrée dans l’ensemble de la législation civile, pénale et administrative en vigueur). (Assemblée générale de l’ONU, 2006)
  • Entreprendre une évaluation des dispositions législatives visant à combattre la violence à l’égard des femmes, y compris des lacunes législatives, des carences d’application, des obstacles à la protection des victimes de la violence, à leur accès à l’appareil judiciaire et aux services offerts aux femmes victimes de la violence, des investissements et des allocations budgétaires à la lutte pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes et des mécanismes de surveillance de l’application effective du droit.
  • Renforcer les connaissances et les capacités des juristes, des procureurs, des avocats commis d’office, des assistants juridiques, des médiateurs, et des autres spécialistes du droit par le biais de formation et développement professionnel reposant sur les modèles actuellement en vigueur et sur les leçons tirées de pratiques législatives utilisées aux fins d’élimination de la violence à l’égard des femmes.
  • Encourager les réformes législatives de nature à renforcer la protection des femmes et à favoriser l’entame de poursuites judiciaires contre les auteurs de violence à l’égard des femmes et autres réaménagements juridiques susceptibles de diminuer le risque de violence à l’égard des femmes et de leur permettre d’éviter la violence ou d’y échapper totalement (comme la promulgation de droits conjugaux égaux pour ce qui est du divorce, de la possession de biens immobiliers, de la garde des enfants ou de la pension alimentaire; l’âge minimum de mariage; et la reconnaissance juridique du mariage coutumier).
  • Promouvoir les cadres juridiques qui combattent les formes de violence à l’égard des jeunes filles, comme le mariage précoce ou forcé; la mutilation et/ou l’excision génitale féminine; et la violence perpétrée à l’occasion de sorties.
  • Encourager la coopération transfrontière et régionale visant à combattre les formes de violence à l’égard des femmes qui se produisent dans un contexte international, comme la traite des femmes, les crimes “d’honneur”, le mariage forcé, la mutilation et/ou l’excision génitale féminine et la violence à l’égard des travailleuses migrantes. (Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et ONUDC, 2005).

Principes juridiques spécifiques

 Veiller à l’application égale de la loi aux différents groupes de femmes (indépendamment de la race, de la classe, de l’origine ethnique, de la religion, du handicap physique, du niveau culturel, de l’âge, de la préférence sexuelle, ou du statut juridique, y compris les femmes autochtones et les femmes migrantes).

 Couvrir toutes les formes de violence, les différents contextes où elle se produit et les auteurs qui y participent (membres de la famille, partenaires intimes – y compris les couples qui ne vivent pas ensemble et les couples du même sexe, membres de la collectivité, autorités de l’État, représentants des forces armées, etc.)

 Désigner tous les services de prévention, de protection et d’assistance intégrée fournis aux  survivantes de la violence (assistance médicale, juridique, professionnelle, au logement, financière) en parallèle avec les procédures de poursuites judiciaires et de condamnation des auteurs de violence, y compris l’obligation faite agents de l’ordre public d’informer les victimes d’un viol de leur droit à l’avortement légal.

 Modifier les dispositions juridiques connexes (relatives au droit familial et aux biens fonciers, à la sécurité sociale, à l’immigration, etc.) de manière à faire prévaloir les droits humains de la femme et l’égalité des sexes par le biais du système juridique. Cela implique, par exemple, l’élimination des dispositions prévoyant la suppression des sanctions pénales en cas de viol si l’auteur du crime accepte d’épouser la femme qui en est la victime.  (Bott et al., dossier de travail de la Banque mondiale).

 Rendre obligatoire la mise en place d’un plan ou d’une stratégie d’action nationale contre la violence à l’égard des femmes (comportant indicateurs et cibles de progression) et, lorsqu’un tel plan existe, renforcer sa contribution au bon fonctionnement du système juridique, y compris l’allocation de ressources.

 Fixer un calendrier et établir des mécanismes institutionnels de développement des capacités et des protocoles à l’intention des autorités compétentes, afin de garantir l’entrée en vigueur de la loi et son application.

 Renforcer les enquêtes et les poursuites judiciaires des affaires de violence à l’égard des femmes par la définition des responsabilités des agents des forces de l’ordre, des procureurs, des magistrats et des sanctions en cas de non-conformité, par la description de pratiques à l’attention d’unités spéciales de la police ou de tribunaux pour femmes et par l’obligation d’allouer les ressources nécessaires à leurs opérations.

 Fournir des conseils sur les mécanismes de surveillance de l’application de la législation, comme l’établissement et le financement de mécanismes multisectoriels de contrôle et de suivi, et d’une base de données statistiques sur toutes les formes de violence à l’égard de la femme et sur les actions visant à y mettre fin. Les mécanismes  institutionnels indépendants continus, comme les médiateurs, le rapporteur national ou les services de promotion de l’égalité des sexes devront faciliter l’application effective de la législation après sa promulgation.

 Prévenir l’impunité des crimes de violence à l’égard des femmes par : l’arrestation et la comparution en justice des auteurs de violence; l’interdiction de toute tentative de médiation pendant le déroulement du procès; la fourniture d’une assistance juridique gratuite aux survivantes de la violence tout le long du processus judiciaire; la garantie du droit de regard des survivantes de la violence sur le déroulement du processus judiciaire et du respect de leurs droits (lors du témoignage, de la collecte et de la présentation de preuve scientifique, par l’élimination des dispositions discriminatoires relatives à la violence sexuelle, etc.), entre autres actions.

 Développer des protocoles pour la délivrance d'ordonnances de protection, d'établir des lignes directrices de la peine qui correspondent à la gravité des crimes, de s'attaquer aux récidivistes et délits aggravés; suppression des exceptions et des peines réduites, et décrire l'application d'amendes et de restitutions à garantir des procédures de sanction normalisés et les résultats tout au long du système judiciaire du pays.

 Reconnaître la validité des systèmes judiciaires des deux coutumiers et formels, et priorité des droits des survivantes de la violence lorsque les deux systèmes sont en contradiction.

Veiller à ce que la sécurité des survivantes de la violence soit effectivement assurée par les membres de sa famille, le droit constitutionnel, civil et pénal, et autres voies de recours juridiques à sa disposition et à ce qu’elles en puissent faire libre usage, contre les auteurs de violence et d’autres personnes qui manquent à leur obligation d’assurer la protection des survivantes (y compris le partenaire intime, les agents de l’État, etc.).

Assimiler la violence à l’égard des femmes à un acte de persécution et la situation des survivantes de la violence sexiste à un groupe social particulier au regard du droit d’asile. (UNDAW, 2008)

 

Leçons tirées:

  • Les changements apportés à une partie du cadre législatif devront correspondre aux autres parties de la législation, faute de quoi les dispositions contradictoires aboutiront à l’application inefficace du droit et à la prise des décisions judiciaires nuisible aux droits des survivantes de la violence.
  • La criminalisation de toutes les formes de violence à l’égard des femmes est essentielle, mais d’autres procédures de recours (civiles) sont aussi importantes dans le cadre d’une approche axée sur les survivantes de la violence, et les poursuites judiciaires engagées dans une affaire ne devraient pas exclure la demande d’ouverture d’un procès dans une autre affaire.
  • Il est impossible d’assurer une application effective de la législation sans un budget et une allocation de ressources appropriés.
  • La législation qui prévoit des programmes à l’intention des auteurs de violence à l’égard des femmes doit les encadrer d’un dispositif de surveillance énergique, de moyens d’action policière adéquats, et de sanctions pénales en cas de refus de poursuivre le programme et de nouvelle infraction, de sorte que la victime de la violence ne s’expose plus à d’autres sévices.
  • L’application stricte des ordonnances de protection et des mesures d’incarcération des auteurs de violence offre une protection immédiate à la victime de la violence, mais a parfois l’effet contraire de décourager la femme de déposer plainte, notamment lorsque la femme (et ses enfants) dépendent financièrement de l’homme et n’ont pas d’autres moyens de subsistance ou lorsque le souci immédiat de la femme est de mettre fin aux sévices perpétrés par son partenaire intime plutôt que de le faire éloigner et/ou d’interdire sa présence à proximité.
  • La formation des juges et des procureurs sur la question de l’égalité des sexes est essentielle pour une application efficace du droit. Il n’est pas rare que les acteurs judiciaires (qui partagent certaines prédispositions socioculturelles avec les autres membres de la collectivité) rechignent à instruire les affaires de violence à l’égard des femmes lorsque les sanctions infligées aux auteurs de violence sont jugées excessives.

Pour apprendre davantage sur les procédures de rédaction, de mobilisation, d’application et de surveillance de la législation pour l’élimination à la violence à l’égard des femmes veuillez consulter le Legislation Module.

Ressources Supplémentaires:

Pour rechercher et consulter la législation existante sur la violence contre les femmes et les filles par pays, voir:

UN Women Global Database on Violence against Women

The World Legal Information Network

Human Rights Information and Documentation Systems

Human Rights Tools

Universal Human Rights Index

Legislation Online

Institute for Law and Justice

Bora Laskin Library for Human Rights

American Bar Association Section of International Law