Les données sur la prévalence des VEFF dans les situations de conflit et d’après-conflit sont limitées (voir le Tableau 1 qui synthétise les données disponibles). Les données sur les incidents sont souvent disponibles dans les situations de conflit et d’après-conflit, notamment dans les contextes où sont utilisés des systèmes de gestion des informations sur les violences basées sur le genre (SGIVBG). Toutefois, ces systèmes de gestion des informations ne recueillent des données que sur les cas signalés (lesquels sont rares), et ne peuvent donc évaluer la véritable prévalence de VEFF au sein d'une population.
Pour les études de prévalence, la collecte de données précises est compliquée par les défis et la variabilité méthodologiques des recherches sur les VEFF dans les situations de conflit et d’après-conflit. Les études sont de qualité variable, et l’absence de consensus international autour d'une méthodologie standardisée pour la collecte de données sur la prévalence des VEFF dans les situations de conflit et d’après-conflit complique la tâche des chercheur-euses sur le terrain. La mise en commun ou la comparaison de plusieurs études sont également compliquées par d’autres obstacles, dont :
- La variabilité de la période de remémoration (par exemple, certaines données précisent la prévalence sur toute la vie, d’autres ne mentionnent que les VEFF subies dans les 6 ou 12 derniers mois, d’autres encore couvrent toute la durée du conflit armé),
- L’existence de définitions différentes des VEFF,
- Le manque de méthodologies d’échantillonnage clairement énoncées/basées sur la population.
Outre ces écueils méthodologiques, il existe d’autres obstacles à la réalisation d’enquêtes de population dans les situations de conflit (p. ex. l’accessibilité des zones de conflit, la barrière de la langue, la crainte pour les survivantes de VEFF d’être stigmatisées, les problèmes de sécurité, etc.), qui peuvent nuire à la rigueur de l’étude ou du S&E de la population.
Les données de prévalence des VEFF ne sont pas nécessaires dans chaque situation de conflit ou d’après-conflit et ne doivent pas être une condition sine qua non au financement de programmes sur les VEFF. Cependant, des données opportunes et précises sur les types, les formes et les causes des VEFF dans les situations de conflit et d’après-conflit sont cruciales. Par ailleurs, il existe très peu de données sur les interventions permettant réellement de prévenir et de réagir aux violences dans ces contextes. Des études plus rigoureuses sont nécessaires pour mieux déchiffrer les VEFF dans les situations de conflit et d’après-conflit.
Tableau 1 : Données de prévalence récente sur les violences conjugales et non-conjugales dans les situations de conflit et d’après-conflit
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Violences conjugales |
Violences non-conjugales |
Les deux/autre/non précisé |
Violences physiques |
Dans 3 sites du Soudan du Sud, la prévalence sur toute la vie de violences physiques conjugales était comprise entre 42 % et 67 % pour les femmes à partenaire fixe et les jeunes filles (Global Women's Institute et International Rescue Committee, 2017).
28,2 % des femmes de 3 régions de Somalie ont indiqué avoir subi des violences physiques conjugales au cours de leur vie (Wirtz et al., 2018).
Pour les adolescentes à partenaire fixe (âgées de 15 à 19 ans) sur 2 sites en zone à conflit dans le Soudan du Sud, la prévalence des violences physiques conjugales était comprise entre 21 et 42 % (Murphy et al., 2018).
42,5 % des réfugiées palestiniennes vivant dans 12 camps de réfugiés ont indiqué avoir subi des violences physiques au cours de leur vie ; 48,9 % des hommes ont indiqué avoir un jour perpétré des violences physiques sur leur partenaire. La prévalence globale des sévices au cours de la vie était de 44,7 % (Khawaja & Barazi, 2005).
29,5 % des Palestiniens réfugiés ont indiqué avoir battu leur femme au moins une fois pendant leur mariage, tandis que 22 % des Palestiniennes réfugiées ont indiqué avoir été battues au moins une fois pendant leur mariage. 10,4 % des hommes et 9,1 % des femmes ont indiqué que cela s’était produit durant l’année écoulée (Khawaja & Tewtel-Salem, 2004).
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14,3% des femmes de 3 régions de Somalie ont indiqué avoir subi des violences physiques non-conjugales au cours de leur vie (Wirtz et al., 2018).
Au Timor oriental, 24,2 % des femmes en situation de conflit ont indiqué avoir subi des violences physiques de la part de personnes extérieures à leur famille pendant le conflit ; 5,8 % ont indiqué en avoir subi après la fin de la crise (Hynes et al., 2004).
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53 à 66 % des Somaliennes réfugiées en Éthiopie (âgées de 18 ans et plus, provenant de 3 camps de réfugiés) auraient subi des violences physiques de la main d'un partenaire ou d'une autre personne au cours des 12 à 18 mois précédents (Parcesepe et al., 2016).
25 à 67 % des Somaliennes réfugiées en Éthiopie (âgées de 18 ans et moins, provenant de 3 camps de réfugiés) auraient subi des violences physiques de la main d'un partenaire ou d'une autre personne au cours des 12 à 18 mois précédents (Parcesepe et al., 2016).
30 à 35 % des adolescentes victimes d'un conflit (réfugiées en Éthiopie et populations victimes d'un conflit en RDC) ont subi des violences physiques de la main d’un partenaire ou d'une autre personne au cours des 12 derniers mois (Stark et al, 2017).
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Violences sexuelles |
Chez les femmes et les filles à partenaire fixe (âgées de 15 à 64 ans) provenant de 3 sites touchés par un conflit au Soudan du Sud, la prévalence sur toute la vie des violences sexuelles conjugales était comprise entre 44 et 50 % (Global Women's Institute et International Rescue Committee, 2017).
24,7% des femmes de 3 régions de Somalie ont indiqué avoir subi des violences sexuelles conjugales au cours de leur vie (Wirtz et al., 2018).
Chez les adolescentes à partenaire fixe (âgées de 15 à 19 ans) sur 2 sites en zone à conflit dans le Soudan du Sud, la prévalence des violences sexuelles conjugales était comprise entre 26 et 32 % (Murphy et al., 2018).
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28 à 33 % des femmes interrogées (âgées de 15 à 64 ans) provenant de 3 sites touchés par un conflit au Soudan du Sud ont subi des violences sexuelles non-conjugales (Global Women's Institute et International Rescue Committee, 2017).
22 à 23 % des adolescentes (âgées de 15 à 19 ans) sur 2 sites en zone à conflit dans le Soudan du Sud ont subi des violences sexuelles non-conjugales au cours de leur vie (Murphy et al., 2018).
3,6% des femmes de 3 régions de Somalie ont indiqué avoir subi des violences sexuelles non-conjugales au cours de leur vie (Wirtz et al., 2018).
Au Timor oriental, 22,7% des femmes en situation de conflit ont indiqué avoir subi des violences sexuelles de la part de personnes extérieures à leur famille pendant le conflit ; 9,7 % ont indiqué en avoir subi après la fin de la crise (Hynes et al., 2004).
9 % des déplacées internes interrogés en Sierra Leone ont fait part d’au moins un cas d’agression sexuelle liée à la guerre (Amowtiz et al., 2002).
Au Liberia, 15 % des personnes victimes d'un conflit interrogées ont indiqué avoir été violées, avoir subi une tentative de viol ou avoir été contraintes à avoir des relations sexuelles par des soldats ou des combattants (Swiss et al., 1998). |
35 à 42 % des Somaliennes réfugiées en Éthiopie (âgées de 18 ans et plus, provenant de 3 camps de réfugiés) auraient été violées par un partenaire ou une autre personne au cours des 12 à 18 mois précédents (Parcesepe et al., 2016).
2,4 à 3,3 % des Somaliennes réfugiées en Éthiopie (âgées de moins de 18 ans, provenant de 3 camps de réfugiés) auraient été violées par un partenaire ou une autre personne au cours des 12 à 18 mois précédents (Parcesepe et al., 2016).
18 à 21 % des adolescentes victimes d'un conflit (réfugiées en Éthiopie et populations victimes d'un conflit en RDC) ont été contraintes à avoir des relations sexuelles par un partenaire ou une autre personne (Stark et al, 2017).
14 à 16 % des adolescentes victimes d'un conflit (réfugiées en Éthiopie et populations victimes d'un conflit en RDC) ont été contraintes à avoir des relations sexuelles par un partenaire ou une autre personne au cours des 12 derniers mois (Stark et al, 2017).
Au Kosovo, 4,3 % des femmes victimes d'un conflit ont dit avoir été violées au cours de leur vie (Hynes & Cardozo, 2000).
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Les deux/non précisé |
Chez les femmes et les filles à partenaire fixe (provenant de 3 sites touchés par un conflit), la prévalence sur toute la vie des violences physiques et/ou sexuelles était comprise entre 54 et 73 % (Global Women's Institute et International Rescue Committee, 2017).
Chez les adolescentes à partenaire fixe (âgées de 15 à 19 ans) sur 2 sites en zone à conflit dans le Soudan du Sud, la prévalence des violences physiques ou sexuelles était comprise entre 39 et 42 % (Murphy et al., 2018).
En Bosnie-Herzégovine, 75,9 % des femmes victimes d'un conflit interrogées ont été maltraitées physiquement, psychologiquement et sexuellement par leur mari au cours de leur vie (Avdibegovic & Sinanovic, 2006). Au Timor oriental, 52,7 % des femmes victimes d'un conflit ayant un partenaire ont subi des violences conjugales dans l’année ayant précédé la crise ou dans l’année ayant précédé l’enquête (après la crise) (Hynes et al., 2004).
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Au Liberia, 49 % des femmes victimes d'un conflit interrogées ont dit avoir subi au moins une agression physique ou sexuelle perpétrée par un soldat ou un combattant sur une période de 5 ans (Swiss et al., 1998).
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17,4 % des femmes interrogées (sur 2 sites accueillant des déplacé-es internes en Irak) ont indiqué que les femmes de la famille étaient la cible de violences domestiques (Lafta et al., 2016). |