- Les ONG du monde entier ont élaboré des dispositifs de suivi des divers aspects de la violence à l’égard des femmes et des filles.
- Les ONG peuvent former des coalitions ou partenariats pour effectuer un suivi de ces formes de violence. Par exemple, le Forum de l’Asie Pacifique sur les femmes, législation et développement (en anglais) a formé un partenariat avec d’autres ONG pour développer des recherches et analyses et élaborer des réponses à la violence contre les femmes dans la région, en même temps qu’elles offraient une plate-forme pour les activités de réseau et de consultations permettant aux ONG de collaborer et de partager leurs informations avec le Rapporteur spécial de l’ONU sur la violence à l’égard des femmes. Voir : Specific Indicator Initiatives and Issues in the ESCAP Region Related to the Measurement of Violence against Women (Initiatives pour la création d’indicateurs spécifiques à la mesure de la violence à l’égard des femmes dans la région de l’ESCAP et questions s’y rapportant) (2007).
- Les coalitions d’ONG rédigent souvent des rapports fantômes qui sont adressés au Comité pour l’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des femmes (CEDAW). Ces rapports sont destinés à accompagner le rapport officiel soumis par l’État et à fournir un point de vue différent sur la situation dans le pays. Voir, par exemple, le Rapport alternatif sur l’application de la Convention de l’ONU sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes en Ukraine (2008) (en anglais) ou le Rapport alternatif d’évaluation de l’application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (2006) (en anglais), Moldavie.
- Un récent rapport de suivi, Violence domestique au Brésil : Examen des obstacles à la promotion de la réforme législative et de ses approches (2010) (en anglais) citait l’importante contribution d’un rapport fantôme adressé par la société civile au CEDAW. Il y était noté qu’en 2007, seules 10 % des municipalités brésiliennes disposaient de postes de police spéciaux pour femmes et que le manque de financements et de formation des policiers avaient limité la capacité de ces postes spéciaux à enquêter sur les crimes de violence contre les femmes. Voir : Brazil and Compliance with CEDAW (Le Brésil et le respect de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes) (2007).
- En Serbie, les ONG ont mené des études indépendantes de suivi de la mise en œuvre des recommandations du CEDAW à la suite du Rapport initial de la Serbie au Comité, en 2007. Leur rapport intitulé Présentation sommaire des conclusions de l’analyse et recommandations (2009) (en anglais) demandait à l’État de recueillir des données sur les types de violence domestique et sur leur fréquence, ainsi que sur les auteurs et les victimes. En outre, les ONG demandaient à l’État d’organiser à l’intention des personnels des services publics une formation systématique sur la façon de traiter les survivantes, et de recueillir des données de suivi sur la façon dont les agents de l’État se conformaient aux enseignements acquis lors de cette formation.
- Les ONG se sont penchées sur de nombreux aspects de la violence à l’égard des femmes et sur divers types de législations en la matière. Par exemple, en 2009, un rapport intitulé Asie : Attention aux failles : Analyse comparative de la réponse juridique des pays de l’ASEAN au tourisme sexuel visant les enfants (en anglais) a étudié l’application des traités internationaux et des lois en vigueur dans les pays membres de l’ASEAN (Association des pays de l’Asie du Sud-Est) (en anglais). Ce premier rapport comparatif des pays de la région sur le tourisme sexuel pédophile avait été commandité par les États de l’ASEAN, l’objectif étant de soutenir les ONG, les représentants des forces de l’ordre, les universitaires, les institutions internationales et les États intervenant dans la lutte contre ce phénomène.
- Produit par l’association indienne « Collectif des avocats pour les droits de la femme », le rapport intitulé Législation sur la violence domestique et son application : Analyse des pays de l’ASEAN sur la base des normes et bonnes pratiques internationales (2009) (en anglais) analyse la législation au niveau régional et fournit une vue d’ensemble des bonnes pratiques utilisées dans les systèmes de réponse à la violence domestique.
- Les rapports des ONG peuvent jouer un rôle essentiel dans l’évolution des politiques en matière de violence à l’égard des femmes et des filles et dans l’évolution des législations.
ÉTUDE DE CAS : L’analyse comparative de l’application des lois sur les MGF dans cinq pays européens par le Centre international de santé reproductive contribue à l’élaboration de directives au niveau national et au niveau international
En 2003-2004, le Centre international de santé reproductive a coordonné une étude de suivi sur les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des dispositions juridiques relatives aux mutilations génitales féminines (MGF) dans les pays européens afin de découvrir pourquoi, malgré l’existence de lois spécifiques, peu d’affaires sont portées devant les tribunaux européens.
L’étude est consacrée à la mise en œuvre des lois et sur les obstacles rencontrés en Belgique, en Suède, en Espagne, au Royaume-Uni et en France. L’évaluation porte sur les points suivants :
- Existence de dispositions pénales sur les MGF,
- Existence de la pratique des MGF dans les communautés locales,
- Déclaration des cas de MGF,
- Enquêtes sur les cas signalés,
- Affaires de MGF portées devant les tribunaux.
Le travail de terrain portant sur l’analyse des documents et des études de cas a été réalisé par des partenaires locaux. Une analyse comparative des données issues des cinq pays a été entreprise. Voir : International Center for Reproductive Health (ICRH), Assessing the impact of existing legislation in Europe with regard to female genital mutilation (Évaluation de l’impact de la législation sur les MGF en vigueur en Europe) (2004).
Le projet de suivi a repéré les facteurs faisant obstacle à l’application des lois sur les MGF et permis d’émettre des recommandations pour améliorer celle-ci, notamment sur le renforcement de la formation des professionnels et de la coopération entre les secteurs. Il a également, chose importante, contribué à l’évolution des politiques en Belgique et dans l’Union européenne (Résolution A5-0285/2001, qui cite le travail de l’ICRH).
- Dans son rapport d’évaluation de 2009 sur la Violence entre adolescents engagés dans une relation amoureuse, État par État (en anglais), l’ONG américaine Break the Cycle (Briser le cercle) note chaque État des États-Unis sur la base des mesures de protection mises en place en faveur des adolescentes victimes de violences dans le cadre d’une relation amoureuse occasionnelle.
- Selon ce rapport, cinq États reçoivent la meilleure note, un « A », (Californie, Illinois, Minnesota, New Hampshire et Oklahoma) et quatorze d’entre eux un « B ». L’un des facteurs pris en considération était la possibilité d’obtenir une ordonnance de protection ou d’éloignement. Seuls neufs États autorisent, sous certaines conditions, les mineurs à obtenir ces ordonnances sans permission d’un parent ou d’un tuteur. Dix États se sont vu attribuer une mauvaise note parce que les relations amoureuses occasionnelles n’entrent pas dans le cadre défini pour l’obtention d’une ordonnance de protection et que les mineurs ne peuvent obtenir une telle ordonnance. Dans ces conditions, selon Break the Cycle, il est très difficile pour les adolescentes victimes de violences domestiques d’obtenir l’aide dont elles auraient besoin.
- Pour une description des autres projets et rapports ayant recueilli des données sur la violence faite aux femmes, et suivi et évalué les systèmes juridiques selon diverses méthodes, voir : Objectif Sécurité: Combattre les violences faites aux femmes dans la région de l’OSCE. Recueil de bonnes pratiques (2009) rédigé par la Section sur l’égalité des sexes de l’OSCE.
ÉTUDE DE CAS : L’Afrique pour les droits des femmes :
Ratifier et respecter ! Cahier d’exigences
L’Afrique pour les droits des femmes : Ratifier et respecter ! Cahier d’exigences (2010) résume les textes statutaires, les lois coutumières, les traditions et les pratiques relatives aux droits fondamentaux des femmes dans plus de trente pays africains. Le rapport a été rédigé par des associations nationales de défense des droits de l’homme et de défense des femmes en Afrique, toutes partenaires de la Campagne « L’Afrique pour les droits des femmes - Ratifier et respecter ! » engagée par la Fédération Internationale des ligues des Droits de l’Homme (FIDH) en collaboration avec des organisations régionales.
Chacun des chapitres par pays commence par recenser les textes relatifs aux droits fondamentaux des femmes qui ont été ratifiés. Les évolutions positives récentes sont décrites en détail, ainsi que les lois et pratiques perpétuant la discrimination et la violence à l’égard des femmes et des filles. La violence, la discrimination au sein de la famille, comme les lois sur le mariage ou les pratiques concernant l’héritage, et d’autres obstacles à la justice, tels que le manque d’accès à l’éducation, à la santé, à l’emploi, à la participation à la vie politique et à la liberté de mouvement sont parmi les sujets mis en exergue.
Par exemple, dans le chapitre consacré au Cameroun, les auteurs notent que bien que le code civil ait fixé un âge minimum pour le mariage, les coutumes et traditions font que les mariages forcés d’enfants restent très répandus. Le chapitre consacré à la République démocratique du Congo prend bonne note de l’adoption de deux lois réprimant la violence sexuelle, mais précise que celle-ci est toujours pratiquée et demeure impunie, même dans les régions relativement stables. Le chapitre consacré au Niger décrit les effets cumulatifs des lois et des règles coutumières et religieuses discriminatoires. Dans chacun des chapitres, un certain nombre de recommandations sont formulées à l’adresse de l’État s’agissant de ces lois et pratiques discriminatoires. Enfin, le document appelle tous les États africains à « ratifier les instruments internationaux et régionaux de protection des droits des femmes, à abroger toutes les lois discriminatoires, à adopter des lois de protection des droits des femmes et à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer leur mise en œuvre effective ».
Cette description des lois et pratiques existantes, suivie d’un rappel des réalités du terrain, est un bon exemple d’étude de suivi et d’évaluation.