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Les différents acteurs humanitaires emploient une terminologie qui leur est propre dans leurs politiques, directives et programmes relatifs aux VFFF. Le sens des divers termes utilisés et leur interprétation par différents acteurs peuvent être source de confusion. Le présent module fait usage du langage des VFFF, mais beaucoup des outils, ressources et programmes qui s’y trouvent décrits en emploient un autre. On trouvera ci-dessous de brèves explications sur certains des termes les plus communément utilisés dans les contextes humanitaires, en rapport avec le problème de la violence à l’égard des femmes et des filles.
Violence sexuelle et sexiste (VSS) |
Les tout premiers programmes humanitaires traitant de la violence à l’égard des femmes et des filles affectées par les conflits se concentraient sur l’exposition à la violence sexuelle et étaient pour la plupart mis en œuvre dans les camps de réfugiés. En 1996, en collaboration avec le HCR, le Comité international de secours (IRC) a lancé un projet dit « Programme de lutte contre la violence sexuelle et sexiste » dans les camps de réfugiés de la Tanzanie. L’inclusion du terme « sexiste » reflétait la volonté du projet de traiter des types de violence autres que les violences sexuelles qui se manifestaient dans ce contexte, en particulier la violence domestique et les pratiques traditionnelles néfastes. Dans la Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes (1993), la violence à l’égard des femmes est décrite comme « tout acte de violence dirigé contre le sexe féminin » et le terme de violence sexiste a été employé de plus en plus couramment dans les milieux internationaux pour désigner toute une série de mauvais traitements auxquels les femmes et les filles sont exposées en conséquence de la discrimination à leur encontre de par le monde dans des contextes culturels dominés par les hommes. Un grand nombre des directives et des ressources relatives à la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles (VFFF) dans les situations de conflit emploient le terme de violence sexuelle et sexiste. L’expression continue d’avoir l’approbation officielle du HCR et d’être employée par lui, la justification du Haut-Commissariat étant exposée dans son document de stratégie sur la violence sexuelle et sexiste de 2011 qui note : « Le HCR emploie volontairement cette expression pour souligner l’urgence d’interventions de protection qui tiennent compte de la nature criminelle et des conséquences perturbatrices de la violence sexuelle pour les victimes/survivantes et leur famille. » (Action Against Sexual and Gender-based Violence: An Updated Strategy, UNHCR, 2011). |
Violence basée sur le genre (VBG) |
Le Consortium Reproductive Health Response in Conflict (RHRC) a commencé au début des années 2000 à plaider en faveur de l’emploi par les partenaires humanitaires du terme de « violence basée sur le genre » afin de clarifier que la violence sexuelle est une composante de la violence sexiste et non pas un problème distinct. En 2005, le CPI a officiellement adopté cette expression dans ses Directives en vue d’interventions contre la violence basée sur le sexe dans les situations de crise humanitaire. Les Directives du CPI donnent de ces violences la définition suivante, qui est la plus communément appliquée dans les situations de crise humanitaire : « Violence basée sur le genre/le sexe est un terme générique pour tout acte nuisible/préjudiciable perpétré contre le gré de quelqu’un et qui est basé sur des différences socialement prescrites entre hommes et femmes » (p. 7). Les Directives du CPI sur la violence basée sur le sexe soulignent le fait que les femmes et les filles sont les « principales victimes de la violence sexiste » et elles se concentrent sur les stratégies visant à lutter contre la violence à l’égard des femmes et des filles. Mais elles reconnaissent que les hommes et les garçons peuvent eux aussi être victimes de violences sexistes, et notamment de violences sexuelles. La définition du CPI reflète donc un élargissement du terme employé initialement dans la Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes; cette extension du terme de violence sexiste en tant que synonyme de violence à l’égard des femmes continue de susciter chez les praticiens de la lutte contre la violence sexiste dans les situations de crise humanitaire des débats sur la portée du terme ainsi que sur son utilité lorsque l’on fait référence spécifiquement à la violence à l’égard des femmes. Dans certains cas, le terme de violence sexiste est employé pour parler de la violence à l’égard des hommes et des garçons et/ou des LGBTI. Certains intervenants humanitaires emploient le terme de violences faites aux femmes et aux filles (VFFF) pour éviter toute confusion possible avec la violence sexiste au sens large. Ils peuvent également faire ce choix terminologique pour éviter certaines des difficultés présentées par la traduction du terme de violence sexiste dans le contexte local considéré. |
Violences sexuelles liées aux conflits |
« On entend par violences sexuelles liées aux conflits des incidents isolés ou (aux fins de la liste demandée par la résolution 1960 (2010) du Conseil de sécurité) des incidents systématiques de violence sexuelle, à savoir: viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable, dont sont victimes des femmes, des hommes, des filles ou des garçons. Ces incidents isolés ou systématiques surviennent dans un contexte de conflit ou après un conflit, ou dans d’autres situations préoccupantes (par exemple lors de troubles politiques). En outre, ils présentent un lien direct ou indirect avec ledit conflit ou lesdits troubles politiques: lien temporel, géographique et/ou causal. Outre le caractère international des crimes présumés (qui peuvent, selon les circonstances, constituer des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des actes de torture ou de génocide), le lien avec le conflit peut être démontré par le profil et les motivations de l’auteur (des auteurs), le profil de la victime (des victimes), le climat d’impunité/d’affaiblissement de la capacité de l’État, les dimensions transfrontalières des crimes et/ou le fait qu’ils violent les termes d’un accord de cessez-le-feu. » (Cadre analytique et conceptuel de la violence sexuelle liée aux conflits, 2011, résumé disponible ici). L’expression « violence sexuelle liée aux conflits » a commencé à être employée principalement par des acteurs des Nations Unies pour englober une gamme plus large d’actes de violence sexuelle associés directement et indirectement aux conflits, au lieu de « violence sexuelle en situations de conflit », plus étroite et peut-être moins précise. |
Exploitation et atteintes sexuelles (EAS) |
L’expression « exploitation et atteintes sexuelles » (ou « exploitation et abus sexuels ») s’emploie le plus souvent pour désigner des agissements d’agents humanitaires à l’encontre de populations bénéficiaires. On parle également de « protection contre l’exploitation et les atteintes sexuelles (PEAS) » en rapport avec la responsabilité des acteurs humanitaires d’adopter des codes de conduite et autres mesures pour limiter l’EAS dans les opérations humanitaires. La Circulaire du Secrétaire général sur les Dispositions spéciales visant à prévenir l’exploitation et les abus sexuels (ST/SGB/2003/13) définit l’EAS et établit certains éléments clés de sa prévention. (Pour de plus amples informations sur l’EAS, voir à la section II les remarques sur la protection de l’exploitation et des atteintes sexuelles.) Il importe de noter que l’exploitation sexuelle et les abus sexuels peuvent être commis par d’autres que les agents humanitaires et que le terme général de « violence sexiste » ou « violence basée sur le genre » englobe souvent ces formes d’exploitation ou d’atteintes sexuelles. Mais en général, l’emploi ou l’absence de l’expression « EAS » permettent de déterminer si les faits dont il s’agit sont attribués ou non à des acteurs humanitaires. |
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Si les termes généraux mentionnés ci-dessus peuvent être utiles pour décrire les phénomènes globaux de violence, il est important lors de la conception et de la mise en œuvre de politiques et de programmes de reconnaître les forces distinctes de violence afin de cibler les efforts de lutte de manière plus efficace. Il est également d’une importance primordiale lors du recueil et de l’analyse des données de préciser clairement de quelques types de violence il s’agit. À cette fin, le projet du Système de gestion de l’information sur la violence sexiste a élaboré un système de classification des incidents. (Le Système de gestion de l’information sur la violence sexiste (GBVIMS) est décrit plus en détail à la Section VII, aux pages consacrées au Recueil des données au sein des programmes de réponse et entre eux.) L’UNFPA propose également la table de définitions suivantes dans son Guide d’accompagnement de la formation en ligne pour la prise en charge de la violence basée sur le genre dans les situations d’urgence qui fait fond sur le GBVIMS: