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Des points focaux, services ou unités spécialisés dans le domaine du genre (ou spécifiquement de la violence à l’égard des femmes) peuvent être établis au sein des ministères concernés (tels que ceux de l’intérieur, de la justice et de la défense) ainsi que dans les quartiers généraux des services de police ou des forces armées ou dans les entités de commandement de niveau sous-national de ces services de sécurité (dans certains bataillons des forces armées par exemple).
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Les services spécialisés/points focaux jouent généralement un rôle stratégique dans l’intégration systématique des questions de genre au niveau interne et dans l’application des politiques et procédures correspondantes. Si certains de ces services institutionnels sont investis d’un large mandat couvrant la coordination et la sensibilisation ainsi que la fourniture directe de services aux survivantes, leurs principales attributions sont souvent :
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La coordination de l’application, du suivi et de l’évaluation (et peut-être la contribution à l’élaboration) de pertinentes stratégies opérationnelles, directives et procédures pertinentes;
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Le renforcement des capacités du personnel en matière d’enquête sur les cas de violence (par exemple par la coordination de la formation des services de police ou des forces armées dans ce domaine);
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L’amélioration de la réponse de la police et des forces armées pour les survivantes, les améliorations pouvant comprendre la mise en place d’un service téléphonique d’urgence, l’établissement d’unités spécialisées à base communautaires dans les entités locales ou de salles pour recevoir les victimes, la promotion de procédures et de protocoles sur les enquêtes, les interrogatoires, l’application des ordonnances de protection, etc.;
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La sensibilisation du public à la violence sexiste et au rôle de la police/ des forces armées dans l’aide aux survivantes (par exemple par l’élaboration de campagnes et de matériels de communication ou la participation à des manifestations publiques sur la question);
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L’appui de la mise en place de systèmes de recueil des données et de gestion des cas pour suivre les informations sur l’incidence de la violence sexiste, ses types et ses modèles et sur le traitement des cas signalés;
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Les fonctions de bureau central pour le signalement de cas de harcèlement sexuel ou d’exploitation ou d’abus sexuels commis par du personnel de sécurité, en l’absence d’organes disciplinaires internes spécialisés;
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Les services ou les coordonnateurs/coordonnatrices des questions de genre doivent disposer de ressources et de pouvoirs de décision suffisants pour avoir un impact sur les pratiques de la police, des forces armées et de l’ensemble du secteur. Ils devraient également se trouver à un niveau suffisamment élevé de la hiérarchie institutionnelle pour pouvoir autoriser et mettre en œuvre les changements proposés selon qu’il est nécessaire.
Pratique prometteuse : Les Services Genre des forces de la Police nationale et de la Défense du Rwanda
En 2005, un Service Genre a été établi au sein de la Police nationale du Rwanda dans le cadre du projet Renforcement de la protection contre la violence sexiste mis en œuvre par UNIFEM sur financement du PNUD. Le projet se déroule depuis cette date, avec l’appui d’UNIFEM (aujourd’hui ONU-Femmes) et des gouvernements de la Belgique, des Pays-Bas, du Royaume-Uni et de la Suède. Le but général de cette initiative est d’améliorer la réponse de la Police nationale du Rwanda face à la violence sexiste, conformément aux engagements du pays en vertu d’accords internationaux et nationaux tels notamment que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, le Protocole sur la prévention et la répression de la violence sexuelle à l’égard des femmes et des enfants (art. 11 du Pacte sur la sécurité, la stabilité et le développement dans la région des Grands Lacs).
Les objectifs du Service Genre sont les suivants :
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Améliorer la logistique de la police pour accélérer les réactions aux rapports de violence sexiste;
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Renforcer les capacités de la police en matière d’enquête sur les cas de violence sexiste;
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Renforcer les capacités de la police en matière de conseils aux survivantes;
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Élaborer des stratégies et des directives sur la prévention de la violence sexiste et la réponse à cette violence;
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Sensibiliser le public à la violence sexiste et au rôle du Service Genre de la police;
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Aider les survivantes à accéder à des services appropriés de santé, de conseils juridiques et de services d’appui psychosociaux;
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Recueillir des données et des informations sur la violence sexiste au Rwanda.
Les capacités (infrastructure et ressources humaines) du Service comprennent un bureau opérationnel doté de six agents au Quartier général de la Police nationale à Kigali, des points focaux sur la violence sexiste dans tous les commissariats des provinces et des districts, des motocyclettes et des véhicules pour assurer une réponse rapide aux rapports de cas de violence sexiste, en particulier en milieu rural, des salles modernes d’interrogation et de surveillance et une ligne téléphonique d’urgence gratuite (3512) pour faciliter la déclaration des incidents.
Dans le cadre d’un suivi novateur, la Force de défense du Rwanda a établi un Service Genre pour favoriser et appuyer l’apport de réponses militaires plus efficaces dans les cas de violence à l’égard des femmes. Depuis la pleine opérationnalisation du Service en 2008, ses personnels ont dispensé des formations sur les concepts relatifs à l’égalité des sexes, les droits de la personne des femmes et la violence sexiste à près de 5 000 personnels de la Défense (officiers, élèves-officiers de l’école militaire, ex-combattants et membres des forces de défense locales) et à des civils, dans trois des cinq provinces du pays. Ils ont également formé des points focaux pour le genre au niveau des districts et appuyé la création de clubs de lutte contre la violence sexiste. La Force de défense du Rwanda a associé le secteur privé à sa campagne et a fait équipe avec la principale compagnie de téléphone cellulaire pour mettre en place une ligne d’urgence gratuite (3945) pour signaler les cas de violence commise par des militaires à l’égard des femmes et des filles.
Le nombre de rapports d’actes de violence communiqués à la Force de défense a augmenté depuis l’établissement du Service Genre. Parmi les facteurs contribuant au succès de l’initiative figurent notamment les faits suivants :
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Les forces armées sont bien placées pour réagir aux actes de violence à l’égard des femmes et des filles, étant déployées au niveau local et en patrouille 24 heures sur 24;
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Les forces armées sont parfois présentes à des heures et dans des lieux où la police ne l’est pas;
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La formation de personnels à titre de préparation pour les missions de paix, dans le cadre des efforts visant à accroître le nombre de femmes déployées et à renforcer leur aptitude à combattre la violence sexiste a influé sur le recrutement et le déploiement de personnels féminins de la police auprès de missions de paix, notamment au Darfour.
Résultats obtenus (2009) :
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Formation de 250 agents de police des comités de police de proximité des cinq subdivisions de la Police aux procédures permanentes de prévention de la violence sexiste et de réponse à cette violence;
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Sensibilisation de 80 femmes du Réseau féminin de la Police nationale du Rwanda (agentes de police, représentantes du Service Genre de la Force de défense du Rwanda et de jeunes des écoles) de 5 régions sur l’application des procédures permanentes relatives à la violence sexiste;
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Formation de 166 officiers de police du Service Genre dans le domaine de la violence sexiste considérée du point de vue des droits fondamentaux et de la sécurité ainsi que dans le domaine des enquêtes;
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Formation de 45 officiers de police aux conseils psychosociaux;
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Amélioration des capacités opérationnelles (achat de 15 motocyclettes) pour assurer une réponse rapide aux incidents, en particulier en milieu rural;
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Renforcement de la collaboration avec la Force de défense du Rwanda, avec notamment la formation de 70 officiers à Kigali;
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Resserrement des partenariats avec les parties prenantes clés tels que les administrations locales, la Force de défense du Rwanda, les prestataires de services médicaux, psychosociaux et juridiques et les défenseurs des droits des femmes;
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Renforcement de la sensibilisation au sein des communautés, des administrations locales (par exemple dans le district de Gasabo District et à Kigali), des établissements d’enseignement (400 enseignant(e)s et étudiant(e)s formé(e)s), des coopératives de femmes (300 adhérentes formées dans les districts de Musanze et de Gicumbi), des organisations confessionnelles et parmi les dirigeants religieux;
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Formation d’un réseau régional du sport pour le changement social ciblant la prévention de la violence sexiste et la riposte au problème;
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Élaboration et diffusion de matériels de sensibilisation (affiches, brochures, revues, autocollants, calendriers) à l’intention des communautés;
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Renforcement du suivi et du recueil et de l’analyse de données dans tout le pays;
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Augmentation du nombre de rapports et d’interventions efficaces dans les cas de violence sexiste;
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Accès accru aux services médicaux, psychosociaux et juridiques pour les survivantes;
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Influence aboutissant à l’établissement d’un réseau des femmes membres de la Police du Rwanda pour une riposte améliorée à la violence sexiste et les activités de réseau.
Extrait de : UNIFEM. 2009.Étude de cas : Establishment of Rwanda National Police Gender Desk (2005-present) [Établissement du Service Genre de la Police nationale du Rwanda (depuis 2005)]. UNIFEM. Kigali.