Les enquêtes peuvent révéler des informations utiles dans le cadre d’une évaluation. Les enquêtes peuvent être relativement simples ou très complexes. Quelles que soient leur taille et complexité, les enquêtes soumettent à tous les participants la même série de questions préétablies. Les enquêtes peuvent recueillir à la fois des données quantitatives (numériques) et qualitatives (narratives). Les enquêtes peuvent être envoyées aux participants par la poste ou via e-mail, ou mises à leur disposition sur un site Web, distribuées à l’occasion de manifestations, ou menées en face-à-face ou par téléphone si les ressources et le contexte s’y prêtent. La recherche au moyen d’enquêtes officielles peut être très coûteuse et fastidieuse, mais si une organisation entend recueillir des renseignements d’un groupe défini et restreint de personnes (par exemple tous les magistrats d’une province donnée), une telle enquête peut s’avérer rentable. Ces organisations peuvent s’associer à une université ou à d’autres chercheurs qualifiés pour solliciter leur avis sur la réalisation d’une enquête. Cliquer sur le lien pour voir un modèle d’un instrument d’enquête qui a été utilisé dans une évaluation relative aux réformes en matière de violence à l’égard des femmes réalisée dans le Santa Clara County (États-Unis). Stakeholder Readiness Instrument (Instrument de mesure de l’état de préparation des parties concernées), à l’annexe 1.
Une évaluation peut également bénéficier de l’utilisation de données existantes. La International Violence Against Women Survey (Enquête internationale sur la violence à l’égard des femmes) a utilisé des données recueillies en Australie, au Costa Rica, en République tchèque, au Danemark, en Grèce, à Hong Kong, en Italie, au Mozambique, aux Philippines, en Pologne et en Suisse pour évaluer:
- La prévalence et la gravité de la violence
- L’impact et les répercussions de la violence sur les femmes
- Les facteurs qui sont liés à l’aggravation ou à la diminution de la violence
- Les expériences liées à la divulgation de la violence à la police ou à d’autres personnes
Le Rule of Law Index (Indice de l’état de droit dans le monde) réalisé par le World Justice Project examine la situation dans 35 pays du monde et inclut des mesures liées à quatre principes suivants:
- Le gouvernement et leurs représentants et agents sont tenus de répondre de leurs actes, en vertu des lois;
- Les lois sont claires, rendues publiques, stables et justes, et protègent les droits fondamentaux, y compris le droit à la sécurité des personnes et des biens;
- Les processus de promulgation, d’administration et d’application des lois sont accessibles, justes et efficaces;
- L’accès à la justice est assuré par des arbitres, juristes ou représentants qualifiés, indépendants et irréprochables sur le plan éthique, et par un personnel judiciaire en nombre suffisant, doté de ressources appropriées et représentatif de la composition des communautés qu’il dessert.
L’enquête décompose cex principes en 10 facteurs clés, dont l’un est axé sur les systèmes de justice informelle.
Le Arab Regional Resource Center on Violence against Women (Centre arabe de ressources régionales sur la violence contre les femmes) recueille également des données et de la documentation sur la violence à l’égard des femmes pour faciliter le travail des responsables politiques. Le site Web du Centre est disponible en arabe.
Surveying Justice: a Practical Guide to Household Surveys (Banque mondiale, 2010). Ce guide entend être un point de départ pratique pour les praticiens de la justice qui s’intéressent à la conception de l’enquête et les spécialistes des enquêtes qui s’intéressent à l’intégration des questions de justice à leurs travaux. Le guide fournit des indications pour la conception d’une enquête, des suggestions de sujets et de questions, et des idées pour faciliter une participation constructive aux débats sur la justice dans les pratiques de développement. Disponible en anglais.
Cambodge - Les données d’une enquête révèlent le besoin de changement d’une stratégie de programmation
Un exemple cambodgien illustre comment les données peuvent révéler les hypothèses éronnées d’une programmation d’enquête. Une enquête à grande échelle et très complexe sur la violence à l’égard des femmes au Cambodge a été menée en 2005 avec le concours de plusieurs organismes internationaux de bailleurs de fonds. L’étude a montré qu’en dépit de pratiquement une dizaine d’années de travail intense accompli par de nombreux organismes de bailleurs de fonds et d’organisations non gouvernementales, la prévalence de la violence domestique en particulier n’avait pas diminué. L’examen détaillé des résultats aux questions posées aux Cambodgiens sur leurs attitudes, convictions et comportements liés à la violence domestique a amené les organismes actifs dans ce domaine à conclure qu’un changement de stratégie s’imposait. La programmation était essentiellement axée sur la sensibilisation des femmes au respect de leurs droits fondamentaux, alors que l’enquête a indiqué que les attitudes sociales au Cambodge justifiaient la violence des hommes vis-à-vis de leurs femmes si celles-ci contestaient leur comportement. Il est devenu évident que la sensibilisation des femmes à leurs droits et aux moyens de résistance à la violence risquait d’avoir des conséquences désastreuses si la stratégie de programmation ne prévoyait pas également des activités de sensibilisation des hommes aux questions d’égalité des sexes. Des programmes précédents s’étaient également efforcés de faire savoir que la violence domestique constituait un crime, mais l’enquête a révélé que pratiquement aucune mesure de répression n’était prise à l’encontre des hommes qui se montraient violents, et que la grande majorité des Cambodgiens n’avaient pas accès aux tribunaux officiels. En conséquence, le fait de promouvoir l’idée que la violence constituait un comportement criminel ne reflétait pas la réalité. Il est important de souligner que la non-application de la loi semblait être l’une des principales raisons des attitudes masculines. Les données de l’enquête ont été essentielles pour révéler que les stratégies de programmation dans le contexte cambodgien devaient être modifiées.
En 2009, une enquête de suivi a indiqué que les sentiments des Cambodgiens vis-à-vis de l’acceptation de la violence domestique semblent évoluer, moins de répondants à l’enquête estimant que certaines formes de violence étaient acceptables. Cette évolution des attitudes s’est également manifestée parmi les représentants des autorités locales et de la police. Néanmoins, le nombre de signalements d’actes de violence sous une forme ou sous une autre était en hausse* et la moitié des répondants croyaient toujours que la violence était un moyen acceptable de traiter les femmes qui se disputent avec leurs maris, ne leur obéissent pas ou leur manquent de respect.
*On ignore si l’augmentation du nombre de signalements d’actes de violence s’explique par le fait que plus de femmes se sentent à l’aise pour divulguer ce type d’incident ou parce qu’elle traduit un accroissement réel du nombre d’actes violents.
Source: Ministère des Affaires féminines. 2005. Violence Against Women: A Baseline Survey: Cambodia; Morrison. 2009. Assessing Behaviours and Attitudes Related to Violence Against Women (Évaluation des comportements et des attitudes liés à la violence à l’égard des femmes), Indochina Research Limited.