Identification de l’agresseur principal

Dernière modification: February 28, 2011

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Lorsque les deux parties affirment avoir été victimes de violences, la loi doit faire obligation aux policiers d’examiner chaque plainte séparément. Ceux-ci ne doivent pas se contenter des éléments de preuve visuels : ils doivent tenir compte du contexte de l’épisode de violence en détectant un comportement dominant chez l’agresseur principal et un sentiment de peur chez la victime. Ils doivent aussi être conscients qu’il peut y avoir d’autres agresseurs ou d’autres agresseurs principaux en dehors du domicile conjugal, par exemple la famille du conjoint qui fait subir des violences ou des menaces de violence à la victime.

Les policiers doivent être capables de reconnaître les tactiques de domination et de contrôle (en anglais). Ils doivent tenir compte, entre autres, des éléments suivants : la gravité des blessures infligées par chacune des parties, les différences de taille et de poids entre les parties, le comportement de chacune des parties, les éventuels antécédents de plaintes pour violences, l’invocation de la légitime défense par l’une des parties, et la probabilité que de nouvelles blessures soient infligées à l’une ou l’autre des parties. Ils doivent aussi tenir compte des éventuelles privations de vêtements ou de nourriture, ou des restrictions du droit de libre circulation de la victime.

Une fois l’agresseur principal identifié, il convient de l’indiquer dans le procès-verbal, en expliquant les raisons qui ont conduit à cette conclusion. Sinon, l’agresseur parviendra à manipuler le système et la victime ne sera pas protégée. Elle risquera alors de ne pas contacter la police lors du prochain épisode de violence. (Voir ci-dessus l’étude de cas sur la carte de poche de Duluth.)

Toute erreur dans l’identification de l’agresseur principal peut avoir de graves conséquences juridiques pour la victime, qui peut par exemple être privée de la garde de ses enfants (en anglais) et de ses droits en matière de logement (en anglais) et d’immigration (en anglais). Par ailleurs, une victime qui n’aurait pas été reconnue comme telle n’aurait pas droit à un hébergement en centre d’accueil (en anglais) ni à d’autres formes d’aide prévues par la loi.

La loi doit aussi s’intéresser aux situations dans lesquelles il n’y a pas de plainte de violence, mais une allégation d’accident ayant provoqué des blessures chez la femme. La police doit connaître les explications couramment fournies par les auteurs de violences pour expliquer les blessures liées à la dot, comme les explosions de fourneaux. Par ailleurs, les policiers doivent savoir reconnaître les brûlures qui sont caractéristiques ou non d’un véritable accident, ou avoir l’obligation de faire examiner la victime par un médecin agréé pour le déterminer. Par exemple, un véritable accident de fourneau causera en général des brûlures sur 30 % du corps au maximum, principalement sur les membres et le ventre, alors que les brûlures domestiques provoquées volontairement pourront couvrir jusqu’à 85 % du corps.

 

ÉTUDE DE CAS :

dans l’affaire Lichhama Devi c. État du Rajasthan, AIR 1988 SC 1785 (Inde), l’enquête de la police sur la mort d’une femme brûlée vive a porté uniquement sur la belle-mère de la victime, et non sur son mari. Pourtant, la belle-mère avait affirmé que son fils pouvait être impliqué dans ce décès, et des voisins avaient raconté que le mari se trouvait dans la cuisine et était descendu en courant pendant que sa femme brûlait. En outre, le fait qu’il n’ait pas aidé sa femme pendant qu’elle brûlait, qu’il ne l’ait pas emmenée à l’hôpital et qu’il n’ait rien fait pour obtenir la transfusion sanguine dont elle avait besoin semblait indiquer une certaine implication dans le décès. Or, la police n’a poursuivi que la belle-mère, et le tribunal a déploré le manque de diligence des enquêteurs.

 

La Loi de Caroline du Sud (États-Unis) sur la violence familiale  (en anglais) contient les dispositions suivantes sur le travail d’identification de l’agresseur principal :

D) Lorsqu’un agent de la force publique reçoit des plaintes contradictoires de deux membres ou plus d’un même foyer à propos d’un épisode de violence conjugale ou familiale, il doit examiner chaque plainte séparément pour déterminer qui a été l’agresseur principal. Si l’agent parvient à déterminer qu’une personne a été le principal agresseur physique, il ne doit pas arrêter l’autre personne accusée d’avoir commis des actes de violence conjugale ou familiale. Pour déterminer si une personne a été l’agresseur principal, l’agent doit tenir compte des facteurs suivants et de tout autre facteur jugé pertinent :

1) les antécédents de plaintes pour violence conjugale ou familiale ;

2) la gravité relative des blessures infligées à chacune des personnes, en tenant compte des blessures dont les personnes se plaignent mais qui ne sont pas facilement visibles au moment de l’enquête ;

3) la probabilité pour chacune des personnes d’être à nouveau blessée ;

4) l’hypothèse de la légitime défense pour l’une des personnes ;

5) les témoignages des membres du foyer sur les antécédents de violences familiales.

E) Un agent de la force publique ne doit pas, dans le but de décourager une partie de demander l’intervention des forces de l’ordre, menacer ou suggérer d’arrêter toutes les parties ni évoquer d’une manière ou d’une autre cette possibilité.

F) Un agent de la force publique qui arrête deux personnes ou plus pour une infraction liée à la violence conjugale ou familiale doit préciser par écrit dans le procès-verbal les raisons qui l’ont poussé à arrêter les deux parties ; il doit également indiquer qu’il a tenté de déterminer qui était l’agresseur principal conformément au présent article mais qu’il n’y est pas parvenu au vu des éléments de preuve disponibles au moment de l’arrestation.

G) Lorsque deux membres ou plus d’un même foyer sont inculpés pour une infraction découlant d’un même épisode de violence conjugale ou familiale et que le tribunal détermine que l’une des parties a été l’agresseur principal aux termes du présent article, le tribunal peut, le cas échéant, relaxer l’autre ou les autres partie(s) (art. 16-25-70).

Voir le Code type des États-Unis (en anglais), art. 205(B) ; et Détermination de l’agresseur principal (en anglais), StopVAW, The Advocates for Human Rights.