Généralités et instruments juridiques internationaux

Dernière modification: January 26, 2011

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  Nous dressons ici un tour d'horizon des différents instruments et documents d'orientation internationaux et régionaux relatifs aux droits de l'homme qui abordent, directement ou indirectement, la question des pratiques néfastes. Le cadre juridique et administratif international contraint tous les États à adopter des lois relatives à toutes les formes de violence contre les femmes et les filles, y compris les pratiques néfastes, à les mettre en œuvre et à surveiller leur application. Si certains instruments font explicitement référence à une ou plusieurs de ces pratiques, la plupart de ceux qui sont mentionnés ci-dessous traitent des pratiques traditionnelles ou culturelles en général. Il convient de se reporter aux chapitres correspondants du présent module de connaissances pour connaître les dispositions du droit international relatif aux droits de l'homme s'appliquant aux mutilations génitales féminines, aux mariages forcés et mariages d'enfants, à la maltraitance des veuves, aux crimes d'honneur et aux violences liées à la dot.

 

Instruments juridiques internationaux

  • La Déclaration universelle des droits de l'homme (1948) a jeté les bases de la protection des femmes contre les pratiques néfastes. L'article premier prévoit que « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits ». L'article 3 dispose : « Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne. » En vertu de l’article 5, « nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ». L’article 7 prévoit : « Tous sont égaux devant la loi et ont droit sans distinction à une égale protection de la loi. » et, aux termes de l'article 8, « toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la constitution ou par la loi ». L'article 12 protège la vie privée ; l'article 16 prévoit une égalité de droits durant le mariage et lors de sa dissolution, et précise que le mariage ne peut être conclu qu'avec le libre et plein consentement des futurs époux. L'article 25 est consacré à la maternité et à l'enfance et, de manière plus générale, l'article 28 dispose : « Toute personne a droit à ce que règne, sur le plan social et sur le plan international, un ordre tel que les droits et libertés énoncés dans la présente Déclaration puissent y trouver plein effet. »

 

  • De la même manière, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP, 1966) interdit la discrimination fondée sur le sexe et demande aux États parties de garantir « que toute personne dont les droits et libertés reconnus dans le présent Pacte auront été violés disposera d'un recours utile » (art. 2). De plus, le PIDCP protège les individus de « la torture [et] des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants » ainsi que des « immixtions arbitraires ou illégales dans leur vie privée » (art. 7 et 17). Le PIDCP prévoit que chacun doit pouvoir jouir du « droit à la liberté et à la sécurité de sa personne » et que « tout enfant […] a droit, de la part de sa famille, de la société et de l'État, aux mesures de protection qu'exige sa condition de mineur » (art. 9 et 24).
  • Le préambule du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC, 1976) reconnaît que les droits de l'homme « découlent de la dignité inhérente à la personne humaine ». Son article 3 dispose que les États parties doivent « assurer le droit égal qu'ont l'homme et la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels qui sont énumérés dans le présent Pacte. » L’article 12 préserve « le droit qu'a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu'elle soit capable d'atteindre ». Dans son Observation générale n° 14, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels précise que les États ont l'obligation de « prendre des mesures préventives, incitatives et correctives pour prémunir les femmes contre les effets de pratiques et de normes culturelles traditionnelles nocives qui les empêchent d'exercer pleinement leurs droits liés à la procréation. »

… toute distinction, exclusion ou restriction fondée sur le sexe qui a pour effet ou pour but de compromettre ou de détruire la reconnaissance, la jouissance ou l’exercice par les femmes, quel que soit leur état matrimonial, sur la base de l’égalité de l’homme et de la femme, des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social, culturel et civil ou dans tout autre domaine. »

En outre, cette recommandation fait les constatations suivantes :

11. Les attitudes traditionnelles faisant de la femme un objet de soumission ou lui assignant un rôle stéréotypé perpétuent l'usage répandu de la violence ou de la contrainte, notamment les violences et les sévices dans la famille, les mariages forcés, les meurtres d'épouses pour non-paiement de la dot, les attaques à l'acide, l'excision. De tels préjugés et de telles pratiques peuvent justifier la violence fondée sur le sexe comme forme de protection ou de contrôle sur la femme. Cette violence qui porte atteinte à l'intégrité physique et mentale des femmes les empêche de jouir des libertés et des droits fondamentaux, de les exercer et d'en avoir connaissance au même titre que les hommes. Tandis que cette observation a trait surtout à la violence effective ou aux menaces de violence, ces conséquences sous-jacentes de la violence fondée sur le sexe contribuent à enfermer les femmes dans des rôles subordonnés et à maintenir leur faible niveau de participation politique, d'éducation, de qualification et d'emploi. […]

20. Il existe dans certains États des pratiques traditionnelles et culturelles qui nuisent à la santé des femmes et des enfants. Ces pratiques incluent notamment les restrictions alimentaires imposées aux femmes enceintes, la préférence pour les enfants mâles, l'excision ou la mutilation des organes génitaux féminins.

 

Ce même comité recommande, toujours dans sa recommandation n° 19 :

(e) Que les États parties précisent dans leurs rapports la nature et l'ampleur des attitudes, coutumes et pratiques qui perpétuent la violence à l'égard des femmes et fournissent des informations sur le type de violence qui en résulte. Ils devraient indiquer quelles mesures ont été prises pour éliminer la violence et quels ont été leurs effets ;

(f) Que des mesures efficaces soient prises pour mettre fin à ces pratiques et changer ces attitudes. Les États devraient adopter des programmes d'éducation et d'information afin de contribuer à éliminer les préjugés qui entravent l'égalité de la femme (recommandation n° 3, 1987) ;

 

Les États parties à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes doivent faire disparaître les pratiques néfastes en adoptant différentes mesures, dont celles consistant à :

(a) Inscrire dans leur constitution nationale ou toute autre disposition législative appropriée le principe de l'égalité des hommes et des femmes, si ce n'est déjà fait, et assurer par voie de législation ou par d'autres moyens appropriés l'application effective dudit principe ;

(b) Adopter des mesures législatives et d'autres mesures appropriées assorties, y compris des sanctions en cas de besoin, interdisant toute discrimination à l'égard des femmes ;

(c) Instaurer une protection juridictionnelle des droits des femmes sur un pied d'égalité avec les hommes et garantir, par le truchement des tribunaux nationaux compétents et d'autres institutions publiques, la protection effective des femmes contre tout acte discriminatoire ;

(d) S’abstenir de tout acte ou pratique discriminatoire à l’égard des femmes et faire en sorte que les autorités publiques et les institutions publiques se conforment à cette obligation ;.

(e) Prendre toutes mesures appropriées pour éliminer la discrimination pratiquée à l’égard des femmes par une personne, une organisation ou une entreprise quelconque ;

(f) Prendre toutes les mesures appropriées, y compris des dispositions législatives, pour modifier ou abroger toute loi, disposition réglementaire, coutume ou pratique qui constitue une discrimination à l’égard des femmes ;

(g) Abroger toutes les dispositions pénales qui constituent une discrimination à l'égard des femmes. Art. 2 (C’est nous qui soulignons.)

 

De plus, aux termes de l'article 5, les États parties à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes sont tenus de « modifier les schémas et modèles de comportement socio-culturel […] en vue de parvenir à l’élimination des préjugés et des pratiques coutumières, ou de tout autre type, qui sont fondés sur l’idée de l’infériorité ou de la supériorité de l’un ou l’autre sexe ou d’un rôle stéréotypé des hommes et des femmes. »

Enfin, l'article 16 de cette convention prévoit l'élimination de « la discrimination à l'égard des femmes dans toutes les questions découlant du mariage et dans les rapports familiaux » et indique expressément :

Les fiançailles et les mariages d'enfants n'ont pas d'effets juridiques et toutes les mesures nécessaires, y compris des dispositions législatives, sont prises afin de fixer un âge minimal pour le mariage et de rendre obligatoire l'inscription du mariage sur un registre officiel, (art. 16(2)).

 

  • La Convention relative aux droits de l'enfant (1989) confie au gouvernement la responsabilité de veiller à la reconnaissance et à la protection des droits fondamentaux des enfants. Dans son article 3, la Convention établit que « l’intérêt supérieur de l’enfant » doit être le principe directeur régissant toutes les actions relatives aux enfants.

Concernant les pratiques néfastes, les États parties à la Convention doivent, au titre de l'article 19(1), prendre « toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives appropriées pour protéger l’enfant contre toute forme de violence, d’atteinte ou de brutalités physiques ou mentales […] pendant qu’il est sous la garde de ses parents ou de l’un d’eux, de son ou ses représentants légaux ou de toute autre personne à qui il est confié. »

La Convention exige également, dans son article 19(2), que les États parties développent des « programmes sociaux visant à fournir l'appui nécessaire à l'enfant et à ceux à qui il est confié, ainsi que pour d'autres formes de prévention, et aux fins d'identification, de rapport, de renvoi, d'enquête, de traitement et de suivi pour les cas de mauvais traitements de l'enfant décrits ci-dessus, et […] également, selon qu'il conviendra, des procédures d'intervention judiciaire. »

L'article 24(3) exige des États qu'ils « prennent toutes les mesures efficaces appropriées en vue d'abolir les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé des enfants ».

De plus, l'article 37 appelle les États parties à préserver les enfants de « la torture [et] des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. »

Chacune des Observations générales suivantes du Comité des droits de l'enfant

désigne spécifiquement les pratiques néfastes comme des violations de la Convention relative aux droits de l'enfant