Le délai entre la promulgation et l’application d’une nouvelle loi sur la violence familiale doit être soigneusement calculé afin que les amendements et législations nécessaires à cette application puissent être rapidement adoptés et promulgués. Voir le Manuel ONU, 3.2.7.
Par exemple, la loi albanaise (en anglais) dispose que le Conseil des ministres doit édicter toute la législation secondaire nécessaire à l’application de la loi sur la violence familiale dans les trois mois suivant l’entrée en vigueur de cette dernière.
ÉTUDE DE CAS : des ONG bulgares se mobilisent pour le financement des moyens d’application de la loi sur la violence familiale.
La Loi bulgare relative à la protection contre la violence familiale (en anglais) a été adoptée en 2005. Elle charge l’État de veiller à la mise en œuvre des programmes de prévention de la violence familiale et de protection contre cette violence, ainsi que des programmes d’aide aux victimes. En 2006, le Conseil des ministres bulgare a adopté un Programme de protection contre la violence familiale. Ce Programme a pour objectifs de résoudre le problème de l’application des ordonnances de protection, de renforcer les sanctions pour les auteurs de violence récidivistes, d’ouvrir une ligne téléphonique d’urgence accessible 24 heures sur 24 et de proposer des foyers d’accueil aux victimes. Début 2007, des recommandations sur la violence familiale ont été publiées à l’attention des policiers ; des coordonnateurs nationaux et régionaux ont été nommés et une base de données des cas de violence familiale a été créée. Cependant, les services prévus par le Programme de protection ont continué d’être fournis exclusivement par des ONG, sans financement régulier de la part du gouvernement.
Il a été difficile d’obtenir des financements de l’État bulgare : non seulement les fonds accordés étaient insuffisants, mais la procédure de versement était complexe. Il existait bien un financement national destiné à la création de foyers d’accueil pour les victimes de violence familiale, mais aucun foyer de ce type n’avait été construit depuis 2007 sur le budget très limité prévu dans le Programme de protection, budget qui prenait la forme d’une ligne budgétaire pour les autorités locales. Il fallait davantage de moyens pour créer des foyers, financer les ONG et mettre en œuvre des programmes pour les victimes et les auteurs de violence, conformément à l’article 5 de la loi. Comme le gouvernement n’aidait pas les femmes en leur proposant des foyers ou une aide psychologique, les ONG s’en sont occupées. L’une d’elles, la Fondation bulgare de recherche sur le genre (FBRG), promeut l’action communautaire dans le domaine de la violence familiale, notamment par le biais de la formation des policiers et des autorités judiciaires.
La FBRG a lancé une campagne pour obtenir le financement obligatoire des services relatifs à la violence familiale afin que la loi puisse être appliquée. La FBRG et le groupe de travail sur la loi bulgare relative à la violence familiale ont mené un travail de pression intensif en faveur d’une modification législative prévoyant explicitement la pérennité financière de la loi, ainsi qu’un fonds pour les victimes. Cette modification dispose que les ONG contribueront à la gestion et à l’utilisation des fonds alloués à l’application de la loi. La FBRG a aussi invité les ONG qui s’occupent des victimes de violence familiale à former une Alliance pour la protection contre la violence familiale (ci-après appelée l’Alliance). En 2008, dans le cadre de son travail de pression en faveur de l’adoption de la modification évoquée ci-dessus, l’Alliance a mené une campagne de 16 jours. Pendant cette campagne, des représentants du ministère de la Justice ont reconnu la nécessité d’établir un fonds spécial pour les victimes de violence familiale. Cette reconnaissance était en soi une victoire importante pour l’Alliance, puisqu’elle intervenait moins d’un an après sa création et le début de son travail sur les modifications législatives.
L’Alliance et le groupe de travail ont continué de faire pression en faveur de modifications sur la pérennité financière. Ils se sont exprimés à maintes reprises devant des représentants de différents ministères bulgares et ont présenté des informations complexes sur les budgets et le calendrier. Ils espéraient que les financements destinés à la lutte contre la violence familiale pourraient être intégrés au budget de l’État dès le second semestre 2009, plutôt que d’attendre le budget de l’année suivante.
En janvier 2009, les projets de modification de la loi ont été examinés par le Conseil des ministres, qui devait décider à quel ministère reviendrait la charge d’allouer les fonds en question. Genoveva Tisheva, membre de la FBRG et présidente de l’Alliance, s’est exprimée devant une commission parlementaire chargée des droits de l’homme sur le lien entre l’absence de politique d’égalité des sexes et le manque de volonté des ministères de s’attaquer à la violence familiale. Peu après son discours, le ministère du Travail et de la Politique sociale a demandé à la rencontrer à propos de l’application future de la loi et pour discuter avec elle d’un mécanisme de financement du travail des ONG dans ce domaine. Cependant, après la consultation avec les ONG et le ministère de la Justice, c’est ce dernier qui a été chargé de coordonner l’application de la loi.
Le 17 juin 2009, le Conseil des ministres bulgare a approuvé plusieurs projets de modification de la Loi bulgare relative à la protection contre la violence familiale, dont un qui prévoyait que, à compter de janvier 2010, le budget du ministère de la Justice contiendrait une ligne budgétaire destinée à financer les programmes d’aide aux victimes menés par les ONG, ainsi que d’autres activités comme la formation des policiers et la surveillance de l’application de la loi. Il était escompté que le nouveau gouvernement et la nouvelle Assemblée nationale, en place après les élections législatives du 5 juillet 2009, soutiendraient, approuveraient et adopteraient ces changements.
Dès les premières semaines du mandat du nouveau gouvernement, la FBRG et l’Alliance ont poursuivi leur travail ciblé de campagne et de pression en faveur de l’adoption des modifications législatives destinées à garantir la pérennité des services aux victimes. Grâce à cette action et à l’attitude favorable du gouvernement et du nouveau Parlement, ces textes ont été adoptés le 9 décembre 2009. À compter de début 2010, le financement des projets des ONG dans le domaine de la violence familiale devrait commencer grâce aux fonds alloués spécifiquement par le ministère de la Justice. Le montant initial prévu pour ces projets en 2010 n’est pas très élevé – environ 500 000 levs – mais c’est un bon début pour les négociations de l’Alliance avec le gouvernement à ce sujet. Le travail et les négociations sur les fonds alloués devraient se poursuivre début 2010.
Le financement durable du travail des ONG contre la violence familiale est donc imminent. La création de l’Alliance a été une étape cruciale dans ce processus, car cette Alliance exprime la voix de nombreuses ONG et a la confiance du gouvernement. La FBRG et l’Alliance vont poursuivre leur travail en vue d’obtenir un plan d’action, l’application de la loi