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Élaboration de modèles théoriques pilotes pour la mise au point d’une approche globale

Dernière modification: February 25, 2011

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  • Le secteur de la santé ne propose pas de modèle unique pour aborder le problème de la violence à l’égard des femmes et des filles, du fait que l’on ne dispose pas de données factuelles suffisantes pour élaborer un programme d’action global dans ce domaine. Il existe toutefois plusieurs modèles qui se recoupent et se chevauchent, qui ont été appliqués globalement et que tous les intervenants actifs dans le secteur de la santé doivent connaître. Le modèle écologique, l’approche multisectorielle et le modèle intégré présentés ci-dessous constituent différents moyens d’action dans la lutte contre la violence sexiste applicables dans les services. L’approche multisectorielle se situe au niveau de l’organisme et du secteur, alors que les modèles écologique et intégré font référence au niveau des prestations de soins.

 

  • Ces modèles peuvent guider la formulation de plans d’action, de programmes et de protocoles du secteur de la santé, ainsi que les approches pratiques qui s’appliquent aux différents contextes nationaux et programmatiques en matière de santé.

 

1.    Le modèle écologique : de l’intervention individuelle au changement social.

 

  • Le modèle écologique, décrit en détail dans le module consacré à la Prévention primaire, propose une méthode qui permet d’appréhender certains facteurs clés aggravants du risque de violence à l’égard des femmes et des filles. Le modèle distingue quatre niveaux de risque : individuel, relationnel, communautaire et sociétal. Il modèle souligne l’importance de la prise en compte de l’interaction, dans toute sa complexité, des facteurs biologiques, psychologiques, sociaux, culturels, économiques et politiques qui accroissent le risque de violence subie par les femmes et les filles (et le risque de violence perpétrée par les hommes et les garçons).

Tableau 1 : Facteurs de risque de violence suivant le modèle écologique

Facteurs sociétaux

Facteurs généraux contribuant à désinhiber en matière de violence

Facteurs communautaires

Quartiers, écoles et lieux de travail

Facteurs relationnels

En famille, avec les partenaires intimes et les amis

Facteurs personnels

Facteurs influant sur le comportement individuel

  • Pauvreté
  • Inégalités économiques, sociales et entre les sexes
  • Sécurité sociale insuffisante
  • Masculinité liée à l’agression et à la domination
  • Faiblesse du système juridique et pénal
  • Non-poursuite des auteurs de violence
  • Droits inexistants pour les victimes
  • Normes sociales et culturelles propices à la violence
  • Armes de petit calibre
  • Conflit ou après-conflit
  • Déplacement interne
  • Camps de réfugiés
  • Taux de chômage élevé
  • Forte densité de population
  • Isolement social des femmes et des familles
  • Manque d’information
  • Soins insuffisants aux victimes
  • Écoles et lieux de travail ignorant la violence sexiste
  • Faibles sanctions communautaires contre la violence sexiste
  • Sécurité insuffisante dans les espaces publics
  • Rôles traditionnels difficiles dévolus aux sexes
  • Incrimination de la victime
  • Violation de la confidentialité
  • Taux de chômage élevé
  • Forte densité de population
  • Isolement social des femmes et des familles
  • Manque d’information
  • Soins insuffisants aux victimes
  • Écoles et lieux de travail ignorant la violence sexiste
  • Faibles sanctions communautaires contre la violence sexiste
  • Sécurité insuffisante dans les espaces publics
  • Rôles traditionnels difficiles dévolus aux sexes
  • Incrimination de la victime
  • Violation de la confidentialité
  • Dysfonctionnement familial
  • Violence intergénérationnelle
  • Mauvaises pratiques parentales
  • Conflit parental violent
  • Fréquentation d’amis ayant un comportement violent ou délinquant 
  • Condition socioéconomique modeste, stress socioéconomique
  • Désaccord sur l’autonomisation des femmes
  • Honneur familial plus important que la santé et la sécurité de la femme

 

  • Sexe, âge et éducation
  • Antécédents familiaux violents
  • Témoin de violence sexiste
  • Victime de maltraitance ou négligence dans l’enfance
  • Faibles moyens de subsistance et revenus personnels
  • Chômage
  • Troubles de santé mentale et comportementale
  • Alcoolisme et toxicomanie
  • Prostitution
  • Réfugié/Personne déplacée
  • Handicaps
  • Détention d’armes de petit calibre

Sources : Buvinic, Morrison et Shifter 1999; Heise et Garcia Moreno, 2002; Jewkes, Sen et Garcia Moreno 2002; Krug et al 2002; http://www.dcp2.org/pubs/DCP/40/Table/40.3 

 

  • Les prestataires de services de santé peuvent utiliser le modèle écologique d’une part pour comprendre les facteurs de risque qui touchent les femmes dans les collectivités où elles vivent, mais d’autre part aussi pour réfléchir aux actions à entreprendre pour réduire les risques à ces différents niveaux.

 

  • Le modèle écologique souligne le fait que l’efficacité de l’application des programmes de prévention et d’action du secteur de la santé contre la violence sera fonction de sa capacité de tenir compte de tous les facteurs qui contribuent à la commission des actes de violence, de se doter des moyens d’identifier les personnes à risque et de soigner les victimes, et de réduire, voire d’éliminer, les risques de violence grâce aux programmes de prévention participatifs. L’utilisation de ce modèle peut permettre aux prestataires de services de santé d’abandonner l’orientation individualiste et biomédicale de la prestation de services en faveur d’une approche plus holistique des soins de santé, qui vise à répondre non seulement aux besoins individuels mais aussi au besoin de changement social.

 

 


2.    Le cadre multisectoriel : engager toutes les parties prenantes dans les actions de prévention et d’intervention.

 

  • Les expériences de programmation sur le terrain indiquent qu’aucun secteur ou organisme ne peut, à lui seul, lutter de manière efficace contre la violence à l’égard des femmes. Le modèle multisectoriel favorise des actions holistiques interorganisations et interinstitutions qui encouragent la participation des victimes de la violence ou des personnes à risque, la coopération, la collaboration et la coordination interdisciplinaire et interorganisations dans tous les secteurs clés, notamment (mais pas exclusivement) dans les domaines de la santé, de l’action psychosociale, du système juridique, judiciaire et de la sécurité (Ward, 2005). Ces secteurs regroupent des institutions, organismes, individus et ressources qui visent la réalisation d’un objectif précis.  On notera que le secteur de la santé comprend le ministère de la Santé, les hôpitaux, les centres de soins, les prestataires de soins de santé, les administrateurs de la santé, les organismes de formation en soins de santé, les fournitures médicales, etc.

 

  • Le modèle multisectoriel s’inspire des modèles « d’intervention communautaire concertée » contre la violence domestique, appliqués à l’origine dans des contextes industrialisés mais qui sont actuellement utilisés partout dans le monde. En règle générale, le modèle multisectoriel correspond à une intervention communautaire coordonnée se situant au niveau national.

 

  • Le modèle multisectoriel définit clairement les responsabilités attribuées spécifiquement à chaque secteur. Les praticiens du secteur de la santé ne doivent non seulement comprendre comment contribuer à l’établissement d’un cadre multisectoriel, mais doivent également avoir une idée claire des attributions et des responsabilités clés des autres secteurs concernés. On trouvera ci-après un descriptif succinct de certaines de ces attributions et responsabilités.  

 

  • Le secteur de la santé devrait offrir aux prestataires de toute la gamme des services de santé une formation leur permettant de reconnaître et de traiter la violence à l’égard des femmes et des filles, prévoir des enquêteurs du même sexe que les victimes de la violence, prendre en charge les besoins physiques et psychologiques immédiats des femmes ou des filles ayant été exposées à la violence, notamment élaborer avec elles un plan de sécurité, établir des protocoles en matière de soins et d’orientation des victimes, élaborer une documentation garantissant la confidentialité, dispenser des soins gratuits aux victimes de la violence et être prêts, avec la permission de la victime, à produire des preuves médico-légales et à témoigner devant les tribunaux.

 

  • Le secteur psychosocial devrait pouvoir fournir une assistance immédiate (groupes de soutien par exemple), des informations sur les droits des femmes et les organismes auxquels s’adresser si elles en décident ainsi, une aide psychologique continue, qui implique une formation et supervision continue des assistants sociaux et des agents des services communautaires, et faciliter l’orientation vers d’autres services en cas de besoin. L’aide à l’éducation et aux activités génératrices de revenu s’inscrit également dans la programmation psychosociale du modèle multisectoriel. Les systèmes d’enseignement devraient consacrer des cours à des sujets comme les « contacts physiques permissibles », les relations saines et les droits fondamentaux de la personne, établir des codes de conduite pour tous les enseignants, offrir une formation sur les signes indicatifs d’une exposition potentielle à la violence chez les enfants et fournir des services en milieu scolaire aux enfants ayant subi des violences. Les projets générateurs de revenu ne devraient pas se limiter à encourager l’autonomie économique des femmes, mais devraient également exercer une surveillance pour détecter les risques de violence familiale et intégrer l’éducation en matière de droits de la personne dans leurs activités.

 

  • Le secteur juridique ou judiciaire devrait pouvoir offrir gratuitement ou à moindre coût des conseils juridiques, une représentation et d’autres formes d’aide juridique aux femmes et aux filles ayant été exposées à la violence, examiner et réviser les dispositions législatives qui contribuent à la violence à l’égard des femmes, appliquer les dispositions qui protègent les femmes et sanctionnent les auteurs de violence, suivre les démarches judiciaires et les procès, émettre des ordonnances de protection et d’autres instruments de protection juridique aux victimes, et vérifier que les auteurs d’actes de violence s’acquittent des obligations de réhabilitation ordonnées par le tribunal (programmes pour auteurs de violence domestique).

 

  • Dans le secteur de la sécurité, il devrait être dispensé aux policiers, militaires et autres agents de sécurité une formation sur le phénomène de la violence à l’égard des femmes et des filles ainsi que sur les méthodes d’intervention appropriées. La police devrait disposer de salles privées pour assurer la confidentialité des entretiens et la sécurité des survivantes qui rapportent des cas de violence, prévoir la présence d’enquêteurs du même sexe que les victimes, établir des protocoles en matière d’orientation des victimes vers d’autres services, recueillir des données normalisées et désagrégées sur les incidents et constituer des unités spécialisées chargées des problèmes de la violence à l’égard des femmes et des filles.

 

  • Parmi les fonctions transversales recoupant chacun des secteurs figurent la participation et l’éducation communautaire, la collecte sûre et confidentielle de données et le suivi et évaluation. Un autre élément important est la coordination inter et intra-sectorielle, notamment la mise en place de systèmes d’information et d’orientation des victimes et la surveillance de ces systèmes, les échanges d’informations, et la participation à des réunions périodiques avec des représentants des différents secteurs.  

 

  • Un principe directeur clé de l’approche multisectorielle est la primauté des droits et des besoins des victimes, qui exige un accès à des services respectueux et sécurisants, des garanties de confidentialité et de sécurité, et la capacité de décider des suites à donner aux incidents.

 

  • Un autre élément essentiel de l’approche multisectorielle est l’établissement d’une coopération étroite avec les groupes féminins locaux. Leur participation dès la conception du programme doit être encouragée et leur contribution active maintenue pendant toute la durée des activités de suivi et d’évaluation du programme et de son développement continu. Voir Principes directeurs pour de plus amples renseignements).